LA SCULPTURE 39 un Armand Dayot svelte et combatif (un vrai Bleu de Bretagne), a séduit une pléiade de sculpteurs qui adoptent sa technique aux touches allongées ; c’est au premier rang l’animalier Rembrandt Bugatti qui fait vivre les félins et les ours en leurs attitudes les plus véridiques et les moins vues; M. Bugatti travaille « sur nature » et point de chic, à l’atelier ; les animaux étudiés ne sont pas figés en poses noblement convenues et traditionnelles, en « cheval de Buffon » ou en s lion assyrien », mais croqués en pleine course, grondant, jouant ou dormant, toujours bien en vie ; Perelmagne, Borghum et Nicolini, qui poussent trop loin — jusqu’à l’escamotage italien — l’imitation de leur maître russe ; ils s’aban-donnent à d’élégantes pochades, à des « instantanés » de statuaire. Il serait inique de passer sous silence l’Enfant nu de M. Angst, un des plus consciencieux élèves de M. Dampt, le Pauvre hon-teux, taillé dans le bois par M. Cornu, et le nu signé par un artiste argentin, M. Yrurtia, qui a su regarder l’oeuvre de Rodin sans s’hypnotiser ; certes , il a ressenti l’influence du maître, mais le petit torse qu’il montre est remarquable de souplesse nerveuse, de force ardente et contenue. Terminons cette revue des oeuvres sculptées par les exposants de la Société Nationale, en applaudissant aux efforts de plusieurs jeunes femmes, que l’exemple de Madame Claudel a tentés. On répète volontiers que si nous comptons en France, à l’heure actuelle, de notoires écrivains féminins, la recrudescence d’énergie féminine n’aurait pas donné en art d’aussi heureux résul-tats. Il est certain que les expositions de femmes artistes s’avèrent souvent d’une déplorable faiblesse. Ce ne sont que mièvreries timides et poncives d’écolières qui n’ont pas su se libérer des formules enseignées dans les officines officielles. Mais il y a aussi en France une pléiade de femmes vraiment artistes sans rapport aucun avec les élégantes et mondaines médiocrités. L’exemple de la Rosalba, d’Adélaïde des Vertus et de l’adorable Berthe Morizot, a été suivi par des femmes de talent qui se nomment Dufau,