32 LES SALONS DE 1906 estompés. M. Gillot ne sort guère de ses effets méridionaux, fort adroits, mais papillotants. Les prairies, éclairées d’une lumière blonde où perce le pâle soleil matinal, d’Émile Claus, sont, vous n’en doutez point, d’un excellent impressionniste. MM. Dagnaux, Agard, Popesco, Guignard, Piet, Francis Jourdain demeurent égaux à eux-mêmes. M. Giron nous fait assister à des luttes de paysans alpins, dont les silhouettes se détachent sur un fond de montagnes rosâtres. Et ce serait fort inique que de passer sous silence la salle entière où furent réunies une trentaine d’ceuvres du vénérable Gustave Colin. Laissons à d’autres le plaisir de railler sa manière actuelle. Lorsqu’on a peint les Pelotaris du Salon de 1863, voire la Cueillette de mais, de la Centennale, ou les paysages, à la Har-pignies, du Salon de 1871, qui ont si bien vieilli, les valeurs étant justes, on a droit au respect des artistes et de la critique. Le Hollandais Mesdag, qui nous montre une fois de plus de grandes barques de pêche voguant sur la mer mouvementée ; M. Guillaume Roger, en qui se retrouvent les finesses de Boudin et surtout de William Morrice ; M. Thaulow, peintre des gaves norvégiens, tourbillonnants et frigides ; MM. Hagborg, Chabanian et Stengelin se sont appliqués de leur mieux à exprimer les aspects tantôt riants, tantôt tragiques, de l’océan. Hélas! les Van Goyen, les Lorrain et les Courbet sont rares parmi nos marinistes con-temporains. Les descendants de Fromentin, de Marilhat , de Decamps et de Dehodencq se nomment ici Dinet, dont les Mauresques exhibent des croupes brunes, des jambes musclées et des seins de marbre foncé ; Émile Bernard, dont l’orientalisme oscille entre Tintoret et Cézanne; Dumoulin et Gumery. Tel est le bilan, en vérité succinct, de l’orientalisme.