26 LES SALONS DE 1906 reprocher au dragon d’être trop joli, trop théâtral, point assez terrible. Quant au second grand médaillon, le Rêve porté par la Chimère, c’est une symphonie de tonalités orangées, bleu tur-quoise, qui enchante. M. Friant, réputé pour le fini et le précieux de son dessin, s’est définitivement classé parmi les décorateurs de murailles. INTIMISME — GENRE — NATURES MORTES ET FLEURS MM. LOBRE , WALTER GAY, GERVEX, JEAN BÉRAUD, ABEL TRUCHET, ZAKARIAN, DUMONT, ANGLADA, JEAN VEBER, ROLL, PIERRE LAGARDE, DAVID-NILLET. Intimisme… Le mot est nouveau, la chose ancienne. Les petits maîtres hollandais, Gerard Dow, Terburg, Pieter de Hooch, épris de recueillement, historiens de la vie simple et familiale, chroni-queurs des moeurs bourgeoises de leur pays, ne furent-ils pas les poètes de la maison, les précurseurs de nos intimistes ? Ce besoin de chanter la quiétude de l’existence intime, la flamme du foyer, les vertus discrètes et cachées, nous le retrouvons chez divers artistes, arrière-neveux des Hollandais et de Chardin. M. Lobre, cette fois, a pieusement établi l’inventaire des églises ; il dénombre avec goût les reflets qui tombent des rosaces et des verrières. Parallèlement, M. Walter Gay inventorie les richesses d’art que contiennent les gentilhommières provinciales ; ils ont beaucoup de talent l’un et l’autre ; le seul reproche qu’on puisse adresser à leurs tableaux d’intérieurs, achevés à merveille, c’est que, parfois, l’humanité en est absente. M. Caro-Delvaille a été tenté par la difficile transcription des émotions musicales. Son robuste Pianiste attaque un concerto de Schumann ; ses mains se crispent sur l’ivoire. Le violoniste et le violoncelliste s’appliquent, penchés sur leurs sonores instruments. Plus d’émotion — songez à Terburg ou à Fantin — devrait, ce semble, régner en cette séance de musique de chambre.