COUP D’ŒIL D’ENSEMBLE 5 teur bourgeois qui inspecte les cimaises de la Nationale. On admire le talent solide mais calme des Cottet, des René Ménard, des Lucien Simon, des Le Sidaner, des Auburtin ; Maurice Denis, que nous connûmes plus combatif, se « classicise ». Plus d’outran-ciers ; ils ont tous fui aux Indépendants et au Salon d’Automne. Par contre, un peu dépaysés au milieu des arrangeurs ingé-nieux ou candides d’anecdotes qui foisonnent aux Artistes français, vous rencontrerez des coloristes hardis, tels le décorateur toulousain Henri Martin, ou le subtil harmoniste Ernest Laurent. En somme, l’esprit des deux Salons n’est pas loin d’être le même. Notons, toutefois, les différences. La Société Nationale s’est tout doucement académisée. Il y règne un ton général de bonne compagnie, de demi-teinte, discret, correct. On sent là une aristo• cratie intelligente, désoeuvrée, élégante, répondant assez bien à ce que les sociologues appellent l’élite actuelle. Vous n’y trouverez guère l’expression de la vie populaire, de la vie religieuse, ni des passions qui remuent le monde autour de nous. Les Artistes français sont moins select. C’est une démocratie bruyante, où nous déplorons parfois, souvent même, le manque de goût, mais la vie matérielle y bat plus intense, on y perçoit le bouillonnement confus de notre temps. C’est un miroir de l’époque, d’une fidélité grossière. Au point de vue de la technique picturale, les uns et les autres ont ceci de commun, qu’ils ont su bénéficier des conquêtes de l’im-pressionnisme objectif. La glaciale distinction du whistlérianisme prédomine, — j’allais écrire sévit — à la Société Nationale. Ce que les Manet, les Renoir, les Claude Monet, les Degas, les Lépine, les Sisley, les Paul Gauguin, les Guillaumin, les Toulouse-Lautrec, ont apporté de neuf (et qu’on a si cruellement raillé), sert à tous nos artistes d’aujourd’hui, qu’ils l’avouent ou non. On hésite main-tenant à peindre des paysages sous l’éclairage à 45° de l’atelier, et l’école dite du « plein-air « a imposé ses efficaces théories. Il n’est pas jusqu’au néo-impressionnisme des Georges Seurat et des Paul Signac qui n’ait enseigné aux railleurs d’antan qu’il faut tenir compte