8 LES SALONS DE 1904 de la place pour laquelle elle est destinée. L’artiste qui décore doit adapter son oeuvre au rythme architectural qu’il a pour mission de continuer et d’exalter. Il y a, cependant, des lois générales aux-quelles il ne peut se soustraire, et nous pouvons juger dans quelle mesure il les a respectées. S’agit-il de décorer un monument dans une grande et antique cité, il importe de trouver dans l’histoire de cette ville, dans le rôle politique, social, intellectuel que la nature et le cours des événements lui ont assigné, quelque motif signi-ficatif. On sait avec quelle hauteur d’esprit Puvis de Chavannes l’a fait pour Amiens et Rouen, Lyon et Marseille. Grande cité de com-merce, non purement bretonne, mais intermédiaire entre la Bretagne et la France, Nantes a son caractère propre : son histoire compte des heures tragiques et des moments solennels, qui ont influé sur les destinées de deux peuples. M. Berteaux, chargé de décorer le grand escalier de son musée, déroule dans une vaste toile, qui n’est pas sans mérite, la procession de la Bretagne mystique. On pourrait discuter sur le choix du sujet. Mais, enfin, acceptons-le et voyons quel parti le décorateur en a su tirer. Sur un fond clair de mer, de ciel et de falaises, ces Panathénées bretonnes dessinent leur sinuo-sité un peu lourde et sombre, laissant sur la gauche un énorme vide. Aura-t-on sur place le recul nécessaire pour embrasser d’un coup d’oeil une si vaste toile, qui manque un peu d’équilibre, mais dont l’effet d’ensemble n’est pas sans grandeur ? Et n’eût-il pas été plus logique de distribuer l’intérêt sur toute la longueur du panneau et de décomposer ce défilé en groupes caractéristiques, à la manière des Triomphes de Mantegna ? L’effet obtenu par l’artiste, qui a dépensé beaucoup de conscience et de talent dans son oeuvre, est plutôt celui du panorama ou de la scène de genre agrandie, que d’une décoration logiquement ordonnée dans son ensemble et dans ses parties. Prouvé expose un plafond destiné à la grande salle de réception de la préfecture de Nancy. Le thème choisi est la Réunion de la Lorraine à la France. La composition est gracieuse et d’un essor