68 LES SALONS DE 1903 Nous pouvons revenir maintenant à notre revue des grandes toiles décoratives ou historiques dont cette histoire en cent actes ou en cent visages divers nous avait éloignés. Elles sont d’ailleurs peu nom-breuses. La plus remarquée de toutes sera sans contredit celle de M. Henri Martin, consacrée aux travaux des champs, et que le livret désigne simplement sous la mention de « panneaux décoratifs, frag-ments d’un ensemble pour le Capitole ». Nous serions bien surpris s’il ne s’agissait pas du Capitole de Toulouse. Et, au surplus, y a-t-il un autre Capitole au monde ? Ces panneaux décoratifs sont d’une vigoureuse couleur, la plus vigoureuse même que nous ait montrée jusqu’à présent M. Henri Martin. L’on ne peut nier qu’ils apportent une fort belle impression rustique qui, non seulement n’est pas gâtée par le procédé haché spécial à M. Henri Martin, mais qui encore tire de ce procédé même une impression vibrante d’atmosphère toute particulière. Le paysage semble se continuer à travers les trois parties du triptyque, mais il est bon de savoir que ces parties se trouvent séparées par de larges fenêtres. Cela ne fera que donner plus de variété à la composition dont la coupe ternaire, sans cela, ne s’expli-querait pas, ou serait peu justifiée. Le panneau principal représente des faucheurs : le panneau de gauche a pour principal motif une idylle paysanne qui se passe, comme de juste, dans la partie la plus prin-tanière, la plus fleurie de ces campagnes ; et, dans le panneau de gauche, plus austère, se trouve une vieille femme avec une chèvre et un bicot. Encore une fois, ce qui fait l’attrait de cette grande page, c’est la couleur et la vérité du sentiment rustique. Cette simplicité vaut mieux que mainte allégorie, et nous n’exceptons pas celles que peignit naguère M. Henri Martin. Reste encore à citer exceptionnellement les grandes compositions de M. Jean-Paul Laurens sur Jeanne d’Arc, destinées à l’hôtel de ville de Tours : la réception de Charles VII, le bûcher, et après le supplice. Bien que les deux premières portent la marque de l’érudite imagi-nation de M. Laurens, la dernière, dans sa dramatique sobriété, sera jugée la plus saisissante et la mieux trouvée : le bourreau est le seul