D’UN MOIS A L’AUTRE AUX DEUX PÔLES DE L’ACTUALITÉ DEUX événements domineront, cette année, de haut, nos soucis quotidiens. L’exposition de Bruxelles, qui sera inaugurée vers la mi-avril, aura pour thème : « Bilan du monde pour un monde plus humain. » Bien que cette manifestation gigantesque dans laquelle cinquante-deux nations donneront chacune un échantillon de son génie puisse inspirer des conclusions aux démographes et aux sociologues, aux humanistes et aux philosophes des réflexions, c’est surtout à la science et à la technique qu’elle se rattache à la matière, en un mot. C’est au contraire au domaine de l’esprit que ressortit le centenaire des apparitions de Lourdes, qui sera célébré, lui, le 11 février. A Bruxelles, on espère trente-cinq millions de visiteurs, curieux de voir ce que sera le monde de demain. A Lourdes, on en attend dix millions — en partie les mêmes, qu’ils soient Polonais ou Brésiliens, mais ceux qui viendront ici penseront que notre bonheur n’est pas sur la terre, quoi que nous y fabriquions. Que certains réprouvent les démonstrations de la foi collective — orgueilleux partisans du dialogue individuel entre Dieu et eux — qu’ils crient à la superstition, voire à l’hystérie, laissons-les dire. Ce sont les mêmes qu’arrêtent dans leur élan tout un pseudo-barrage de rationalisme hautain, tout un narquois mépris pour l’iconographie populaire, toute une ironie stridente envers les cantiques enfantins. Ils ne savent pas distinguer le bon grain de l’ivraie ; ils ne veulent pas reconnaître que déjà, en se vouant à autre chose qu’à leurs petites affaires, les brancardiers de Lourdes s’élèvent au-dessus de l’égoïste et du mesquin. Ces esprits forts se refusent à voir que ni la politique, ni la philosophie, ni la science ne conduisent au progrès réel ni au bonheur vrai ; et que s’il n’y avait pas autre chose que les tribulations relatées chaque matin dans les journaux, ce serait à désespérer vraiment des hommes et des choses. • • Centenaire des apparitions de Lourdes, il serait plus exact de dire centenaire des visions ; car Bernadette Soubirous seule a vu la Dame. Si elle était réellement apparue, d’autres l’auraient vue. Non. Ce message optique (et acoustique, puisque la petite entendit aussi, dans son cerveau, une voix) n’était destiné qu’à une créature et c’est à Lourdes qu’il fut capté. Cette vision miraculeuse fut un point de départ, celui des guérisons. Elles se produisirent devant cette grotte qui avait polarisé le courant mystique, faisant communiquer la terre avec le ciel comme le cratère B,rnudeu, m… d’un volcan par où le feu intérieur entre en contact avec l’air. Lourdes un bouillonnement de la foi ; sans aucune idée péjorative, un abcès de fixation d’un flot immense et bénéfique. Le 11 février 1858, Bernadette brancha l’humain avec le divin. Depuis lors. l’intensité — on aurait envie de dire le survoltage — de la prière à Lourdes