Marie est bien davantage qu’Eve au commencement de tout : car le vrai commencement, c’est le recommencement après un premier échec, c’est la seconde innocence, c’est le moment où l’on voit que la faute est heureuse et que tout va se refaire sur un plan meilleur. Eve, dirai-je encore, c’est cette énigme de la faute d’un instant, qui dure par ses suites. Marie, c’est le mystère du pardon, qui dure éternellement. EVA, AVE : il suffit de renverser le nom d’Eve pour obtenir le mot de Marie, celui par où l’Ange la salue. Une toute petite mutation ! une toute petite différence ! Un sourire, un léger allongement des lèvres et tout est modifié. Tout change de sens avec Marie, comme tout change de sens avec le sourire. La présence de la Femme éternelle nous tire vers le haut, disait Goethe à la fin du second Faust. Et peut-être alors puis-je comprendre le double sens du mot Grâce et pourquoi les hommes ont appelé de ce même mot de Grâce, par une sorte de confusion sublime, ce qui est le plus visible dans la beauté humaine et ce qui est le plus caché dans le divin. JEAN GUITTON.