LES RIDEAUX FORMENT UN « DECOR » E retour à l’ornementation a ramené le rogne du tapis ier Len restituant aux rideaux le rôle décoratif qu’ils ont eu constamment depuis le xvine siècle. Suivant le tissu employé, leur couleur ou la forme de leurs draperies, ce sont les rideaux que l’on charge de donner son style à une pièce et de lui apporter un élément de somptuosité, de chaleur ou de gaîté. Aussi le choix d’un tissu et d’une couleur appropriés est-il d’une importance primordiale. Les tissus légers : faille, taffetas, moire, toile de soie, auxquels on peut ajouter les chintz, percale et toile imprimée, « tombent r, en principe, mieux que les tissus lourds : velours de laine et de coton, toile de laine, drap et feutre, dont les plis naturels sont moins harmonieux. Entre les deux se placent les tissus moyens : satin, damas, velours de soie, reps et ottoman, qui se traitent comme les tissus lourds. Généralement, les tissus légers ne se doublent pas, afin de garder leur couleur et leur transparence. S’il faut se protéger du jour, dans une chambre par exemple, il est préférable d’intercaler entre la fenêtre et le « décor s (ainsi que les tapissiers appellent les rideaux) un deuxième rideau droit, indépendant, de satinette noire, et non d’une autre couleur foncée, car seul le noir est opaque. Toutefois, si l’on veut empêcher un tissu léger d’être s mangé par les rayons du soleil et par ceux, encore plus pernicieux, de la lune, on peut à la rigueur le doubler. Mais si l’on souhaite lui donner du poids ou, pour des raisons de chaleur, le rendre plus épais, il est indispensable d’intercaler une finette, sorte de molleton léger, entre la doublure et le tissu, sinon le doublage sera sans effet. Les tissus moyens et lourds se doublent toujours, ce qui augmente leur durée. Tous les rideaux peuvent être habillés de passementerie, soit de même ton, soit de ton complémentaire ou contrasté. Pour les tissus légers, cette passementerie est une petite frange, unie ou s couponnée , (c’est-à-dire de deux tons mélangés). En effet, le galon, d’application ou bordant, ne peut être posé que sur un rideau doublé, sinon à contre-jour il apparaîtra forcément noir en raison de la transparence. Pour les tissus lourds, c’est seulement le style et la couleur du rideau qui doivent guider dans le choix de la passementerie. Celle-ci varie à l’Infini, depuis la plus simple jusqu’à la plus compliquée et la plus somptueuse. Très en honneur au xvne siècle, sous le Second Empire et à la fin du siècle dernier, elle connais de nouveau un regain de faveur. le sujet est si vaste et si important, que nous lui consacrerons bientôt un article spécial. If faut calculer pour l’achat d’un tissu léger le double de la dimension de la fenêtre, et pour celui d’un tissu lourd une fois et demie seulement. Dans ce calcul, on élargit la fenêtre d’au moins vingt centimètres de chaque côté (soit la longueur de la tringle) pour donner de l’ampleur au décor et dégager la partie vitrée quand les rideaux sont ouverts. Il y a lieu éga-lement d’y ajouter pour les retours environ treize centimètres de chaque côté, soit au total o m. 66 en plus de la largeur ouvrante de la fenêtre. Tous les rideaux sont obligatoirement terminés dans le haut par une s tête s. Quand le haut du rideau est caché par un larn-brequin, une draperie ou une boite à rideau, cette tête est simplement froncée sur le s galon r de tête, qui supporte les agrafes et les anneaux pour répartir également l’ampleur du tissu sur mute la largeur. Quand le haut du rideau est appa-rent, celle-ci peut être soit Une tête bouillonnée rapportée sur le rideau monté, soit une tête à plis plats ou à plis creux dont l’ampleur est réparti par des pinces àespaces réguliers. Pour donner du style et de la richesse au décor de fenêtre, et augmenter la hauteur de celle-ci, les rideaux peuvent être coiffés soit d’un bandeau, froncé comme un petit rideau, avec une tète rapportée de la même façon que pour les grands rideaux ; soit d’un bandeau plat appelé e lambrequin u ou îî cantonnière r, dont la forme, la découpe, les applications de galon ou de passementerie varient à l’infini ; soit de draperies, appelées r décor de dessus « , avec ou sans chute sur le côté, de même tissu et de même couleur ou, au contraire, de tissu et de couleur différents. Les rideaux peuvent être complétés par des embrasses assorties, soit en même tissu, nu ou orné de passementeries, soit en cordelière, avec ou sans glands. Il est extrêmement raffiné de superposer au voilage d’une fenêtre ou même de remplacer tout à fait celui-ci par des / sous-rideaux », plus clairs ou plus légers que les décors de fenêtre et souvent de tissu contrasté. L’alliance de sous-rideaux en taffetas avec des rideaux de satin est particulièrement heureuse. Dans ce cas, le premier rideau reste, le soir, drapé dans ses embrasses et ouvert sur ce sous-rideau que l’on dissi-mule le jour en le tirant. JEAN-PIERRE GUERIN. 41