quoi jouent les hommes Ne sourions de graves essieurs jouer au croquet du Luxembourg, manoeuvrer un cerf-volant avec une application de petits garçons, faire une belote sous un parapluie ou monter une garde jalouse autour du chemin de fer électrique de leur fils. Et ne nous pressons pas de déclarer, d’un ton supérieur, qu’ils auraient mieux à faire pour meubler leurs loisirs et enrichir leur esprit. Les sages des temps modernes ne sont-ils pas ceux étui, dans la vie trépidante de Paris, savent s’isoler en de naïfs plaisirs et prolonger jusque dans l’âge mûr les enthou-siasmes de l’enfance ? Ceux qui, renonçant de leur plein gré aux formes dangereuses du jeu — comme les courses ou la Bourse, comme l’automobile, ce hochet d’homme, prétexte à tant de folies, ou comme les sports poussés si souvent au delà des forces normales — se groupent sans distinction de classe ou de fortune, dans le seul dessein de se distraire. Paris fourmille de petits clubs et de sociétés dont les présidents au front parfois dégarni, et ayant derrière eux toute une vie d’efforts, lancent le cochonnet dans un square ou poussent un bateau sur le bassin des Tuileries. Et, de l’avis des psychiatres, beaucoup d’hommes se libèrent ainsi de certains complexes et acquièrent un équilibre plus que jamais indispensable à la vie sociale. Chaque jour, les joueurs de belote se réfugient dans le jardin du Luxembourg, à l’abri du vent, contre un mur. Chaque jour, ils se retrouvent pour goûter, loin du monde, des émotions toutes simples que reflètent leurs visages.