A gauche : la vitrine où sont entassées les innombrables coupes gagnées en course par Herbulot, qui a défendu, en 1936, nos couleurs à Melbourne. Sur la page de droite : l’atelier du couple, où Herbulot coupe des voiles aux couleurs des yachtmen. Par la fenêtre ouverte, on aperçoit le balcon, lui aussi trans-formé en jardin tropical. des beaux-ares, ils n’auraient jamais pu ni dessiner des coques ni réaliser des voiles dont la mise au point exige une précision mathé-matique et le sens des formes et des résistances. Ainsi se trouve une fois de plus injustifié le reproche souvent fait aux grandes écoles de ne former que des spécialistes, tous fondus dans un moule unique. L’atelier qu’habitent H. et J.-J. Herbulot dans une rue tranquille du XVIe arrondissement est à l’image de deux êtres qui, incapables de choisir entre la terre et la mer, offrent indifféremment à leurs clients la fixité d’un toit et les promesses de l’aventure ; les planches à dessin et les échantillons de matériaux y côtoient des cordages et des machines à coudre ; des projets d’immeubles parisiens naissent dans une végétation tropicale d’île lointaine que leur nostalgie du voyage a recréée en pleine ville. Car de véritables arbres — caout-chouc géant et philodendrons, hauts de 3 mètres — ont envahi l’atelier, ne laissant passer qu’un soleil enrichi de reflets. Cinq chats, avec des allures de fauves, se glissent dans cette forêt vierge en chambre à laquelle abordent des caravelles et des voiliers en miniature. Aux murs, des peintures, des photographies de bateaux que les voiles conçues ici même ont conduits à la victoire ; dans une vitrine, des coupes gagnées sur toutes les mers du monde. Jean-Jacques Herbulot a installé son bureau au delà de la forêt, dans une petite pièce qui n’est séparée de l’atelier que par le mur de verdure. De sa place, il aperçoit sa femme et sa fille (une étudiante qui, elle aussi à l’occasion, coupe des voiles) à travers une luxuriante végétation. C’est dans ce décor de solitude exotique qu’il a conçu ses premiers bateaux avec l’intention de mettre à la portée de tous un sport auquel il doit lui-même tant de joies. UNE RÉVOLUTION DANS LA TECHNIQUE Il créa tout d’abord le Dinghy, en 1941. C’était un bateau qu’il avait dessiné pour son propre compte et qu’il voulait rapide pour aller à la pêche et profiter au maximum des quelques heures de navigation qu’autorisait alors l’occupant ; les excellents résultats obtenus par ce voilier l’incitèrent à le faire construire en série. Encouragé par cette réussite, il conçut, depuis lors, et réalisa plus de trente types de bateaux dont l’Argonaute, pour les centres de formation nautique, le Triton-Scout et enfin le Vaurien, en 1953, pour le centre des Glénans. Ce dernier, un monotype à dériveur, de 4 mètres de long, ayant 8 mètres carrés de voilure, a pour les débutants le triple avantage d’être léger, stable et d’un prix d’achat réduit (70 000 francs, alors que le prix minimum de tout autre monotype