LA MUSIQUE LA tradition peut être suivie, cette année encore, de se lamenter, dès les premières semaines de la saison musicale, de ce que la même éternelle routine conti-nue de régner dans les programmes des concerts. Il n’est évidemment pas question de disputer à Mozart., Beethoven ou à Chopin leurs royautés splendides, mais il est permis une fois de plus de regretter que les donneurs de récitals et les associations symphoniques n’aient pas un souci plus accentué d’afficher quelques nouveautés prises soit parmi les chefs-d’œuvre méconnus de jadis, soit parmi les ouvrages que nous fournissent les coinpo-siteurs contemporains. En fait de nouveauté véritable la moisson est en effet bien maigre, et l’on ne peut guère signaler que l’audition d’une partition due à un musicien prématurément disparu il y a quelques années, Pierre Vellones, le Roi Salomon, composée sur un argument tiré par Jean Lahor du Cantique des Cantiques. Dans cet ouvrage exécuté par notre excellent Orchestre national dirigé par Roger Désorrnière — l’un des plus ardents et courageux défen-seurs de la musique contemporaine — on retrouve les qualités de lyrisme généreux, de fantaisie et d’imagina-tion qui nous font tant regretter la perte de cet auteur auquel Nadine Sautereau, Lucien Lovano et surtout le magnifique baryton Pierre Mollet ont prêté le concours de leur talent. Toujours côté premières auditions, le quatuor Lcewenguth, qui a consacré un cycle à la création d’œuvres de jeunes musiciens,. nous a révélé le quatuor de Suzanne Ventoura, celui, un peu fade mais charmant, de Charles Chaix, et enfin celui de Georges Delarue, ‘titulaire du prix de composition de cette année au Conservatoire de Paris, artiste qui possède une authen-tique personnalité, de solides et vigoureux moyens d’expression, mais à qui il manque encore une certaine maîtrise pour ordonner toutes ces qualités sur lesquelles il faudra cependant compter à l’avenir. Côté récitals, celte période aura été le temps des pianistes, enraison de la commémoration du centième anniversaire de la mort de Chopin. Il faudrait plusieurs pages pour rapporter les folies burlesques auxquelles ces cérémonies du souvenir ont donné lieu, telle par exemple cette affiche qui demeure encore apposée sur certains murs de la capitale et qui semble une photographie prise à la morgue, où l’on aurait rassemblé les débris d’un Chopin victime d’un accident de la rue, ou ces programmes consternants imprimés sur des billets de faire-part. Pourquoi pas une conférence du docteur Paul ?… Fort heureusement, il y eut quelques très belles soirées, dont, faute de place, je ne citerai que les plus mar-quant vs : 1,1 d■•At.AIIred Cortot, dont je m. lev dan m•ca iv rI.•■1■,•”■■■-ril. l’authentique ..s. c.•.•. dem ales runiversit■’; p— Il. Ili.1.11:11.■1 1;,1,11■, remarquable conférencier .1u. nous a présenté trois aspects différents de Chopin at cc les concours successifs de Jean Doyen, Monique do la Bruchollerie et Samson François, qui ont tous trois montré, dans des styles et des sentiments différents, à quelle beauté d’exécution conduisent une véritable intelligence et une profonde piété. Au piano toujours, mais dans le royaume féerique et enchanté de Ravel cette fois, nous avons eu le plaisir de retrouver, après de longues années d’absence, l’un des ambassadeurs ks plus efficaces sic l’art français à l’étranger, Gil Marelles, qui a consacré son récital de rentrée l’audit…ri intégral, de Co•lvrit pianistique du musicien Searle,. Ili pea d’emot ion sans doute — bien compré-hensible riv lui a peul-être pas laissé tout au long de ce redoutable programme l’aisance technique totale requise i, l’ensemble reste satisfaisant par la qualité du style. Pour en revenir à Chopin, l’U. N. E. S. C. O. a pro-voqué un concert au cours duquel on a pu entendre des ouvrages composés spécialement pour la circonstance par des musiciens contemporains en hommage au maitre polonais. Si celui-ci n’a pas toujours très heureusement inspiré Jacques Ibert, Villa-Lobos, Malipiero, Lennox Berkeley, Carlos Chavez et quelques autres, le Tombeau de Chopin, d’Alexandre Tansman, et surtout la Suite polonaise, d’André. Panufnik, tous deux compatriotes du musicien des Nocturnes, sont parfaitement dignes des pages immortelles, qu’ils honorent avec une réelle et profonde émotion. Enfin, du côté chefs d’orchestre, on a cula joie d’applau-dir M. Vilheltn Furtwavngler à la tete de cette admirable phalange qu’est la Philharmonique de Vienne. Une fois pour toutes, je confesse ne plus pouvoir trouver d’adjec-tifs pour parler de ce musicien, qui, malgré des programmes sans surprise, parvient avec une aussi constante certitude aux miracles de sonorité, de sensibilité et de style aux-quels il nous a depuis longtemps habitués. M. Rafael Kubelik, ancien chef de la Philharmonique tchèque, est venu diriger l’orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire : par son tempérament et sa technique 11 semble un frère cadet de M. Furtwangler. Je ne vois pas de plus brillant éloge à décerner att nmgnifique talent qui le met an tout premier rang des artistes de noter temps. 90 Ctnu tut If OSTA