Phot. R. Esomat Autre époque… autre harnais. CHEITILIERS 0111,1011111111 par JULES ROY. CE que je vais dire risque de faire éclater de rire tout Saint-Germain-des-Prés je crois à la cheva-lerie. J’y croirai tant qu’il y aura des hommes et des guerres. Tant qu’il y aura, du moins, des guerres qui permettront aux hommes l’exercice de la chevalerie. Ce ne sont pas les chevaliers qui provoquent les guerres. Ils s’y jettent les premiers, comme jadis, pour défendre la cause de leur foi. Non par amour de la guerre, mais par amour de ce que la guerre leur permet de tirer d’eux-mêmes. En échange, ils n’attendent rien, que la paix et le salut de leur âme. Aujourd’hui où les croisades n’ont plus de croix, que reste-t-il qui distingue les chevaliers des autres hommes ? Leur arme, d’abord, c’est-à-dire leur métier de soldat, et la machine qui les précipite au combat. C’est l’arme qui fait le chevalier. Je veux dire qu’il n’y a pas de chevaliers a dans le civil s, sinon a les cheva-liers d’industrie s, qui ne manquent pas. On ne consacre pas un chevalier comme un prêtre. On l’arme. On frappe ses épaules du plat d’une épée. Maintenant les épées sont accrochées au musée des Invalides et n’ont plus qu’une valeur de symbole. Des chevaliers à pied, certes, il s’en est trouvé, et il tqu’autre I ois on hissait le chers-■ en elle après l’avoir bouclé dans son Pièces modelées par Eua Poison. s’en trouve encore. Mais le chevalier éprouve une telle hâte à affronter l’ennemi qu’il a besoin d’une monture pour le porter à ses devants. Il n’attend pas. Il est la fleur de la bataille, l’aigrette ensanglantée qui flotte au-dessus de la mêlée. La masse est nécessaire aussi, autant que lui. Plus méritante, et plus sainte que lui peut-être ? Là n’est pas la question. Ce n’est pas la sain-teté qui fait le chevalier, mais l’ardeur. Sans lui, la masse devient inerte ; elle n’est plus qu’un poids mort. A présent, il est dans la tourelle des chars ou dans la carlingue des avions. Des chars, je ne parlerai pas, puisque je ne les connais pas. Les chevaliers abondent chez eux. Mais les plus cavaliers des cavaliers n’étaient-ils pas à demi aviateurs, et ne les avons-nOus pas taquinés parce qu’ils escaladaient nos carlingues en bottes et en éperons ? Personne ne pourra me soup-çonner de vouloir grapiller quelque parcelle de la gloire des aviateurs. Je me suis toujours défendu d’appartenir à l’ordre des pilotes-chevaliers. Je me suis posé trop de questions qui ont attiédi ma foi ; je me suis laissé escorter par trop de démons. Et puis, j’étais bombardier, et notre combat n’avait rien de chevaleresque, parce que nous ne nous attaquions pas toujours aux armées de l’adver-33