US DISQUES COMMENT, dans l’envoi toujours bien achalandé de Pathé-Marconi, ne pas accorder cette fois-ci la préséance au deuxième album des Sonates pour clavecin de Scarlatti ? Wanda Landowska, qui fête cette année son soixante-dixième anniversaire, s’y affirme une fois de plus, par la pertinence de son style, la perfection de sa technique, son élégance et sa grâce, comme la reine sur laquelle les années n’ont point de prise — et dont la finesse de la gravure ne trahit point les prestiges. Sans oublier, parmi les réimpressions opportunes, la Quatrième Symphonie de Beethoven et l’ouverture de la Force du Destin de Verdi, sous la baguette vibrante d’Arturo 56 Toscanini, l’ouverture des Vêpres siciliennes de Verdi, à laquelle un Victor de Sabata sait conserver sa jeunesse, j’en viens trop vite, hélas ! aux nouveautés orchestrales proprement dites : le Stenka Razine, trop négligé, malgré sa puissance évocatrice indéniable, d’Alexandre Glazounow, dû à M. Jean Giardino et à la Société des Concerts du Conservatoire; l’irrésistible Iberia d’Albeniz, dans la somptueuse mais un peu trop dense version orchestrale de A.F. Arbos, que M. P. de Freitas-Branco et ses troupes des Concerts Lamoureux ont su fort habi-lement adapter aux nécessités de la réalisation phono-graphique ; le Deuxième Concerto pour piano et orchestre de Mendelssohn, presque toujours sacrifié au premier, et que M. Jean Doyen interprète dans la véracité de son esprit ; la vivante Symphonie de jeunesse de Bizet, confiée aux soins de M. Rodzinski et de la Philharmonie new-yorkaise ; la divertissante rapsodie de G. Gershwin, un Américain à Paris, à laquelle M. André Cluytens et l’Orchestre français du Conservatoire dispensent en retour leurs soins ; et, dignes de la vedette américaine que je leur donne ici, les suggestifs Tableaux d’une exposition de Moussorgsky, instrumentés par Maurice Ravel avec l’éblouissante maitrise que l’on sait, et dont la gravure fait grand honneur à l’Orchestre national de la Radio-diffusion française et àson chef, M. Paul Klecki… Une mention au bel organe de Mme Juyol dans l’air du Trouvère et à la rare musicalité de M. Dinu Lipatti, pianiste de grande classe, dans l’Alborada de Maurice Ravel. Chez Polydor, l’enregistrement de la Sonate appas-sionata de Beethoven par Wilhelm Kempff constitue sinon une photographie sonore entièrement fidèle, du moins une leçon de style du plus haut prix. Vous appré-cierez sans doute comme moi la brillante virtuosité du chef d’orchestre Karayan dans l’ouverture de Sémiramis de Rossini, les impeccables prouesses du violoniste Ricci dans le Concerto en ré de Paganini, la verve mordante du ballet de Chout de Prokofieff, dans le nouveau tirage de l’enregistrement de l’Orchestre Lamoureux sous l’égide d’Albert Wolff. Chez Decca, M. Charles Winch, après la Réformation-Symphonie., qui n’est pas à mon gré la meilleure de Mendelssohn, nous offre, avec la collaboration du London Philharmonie orchestra, en deux disques sonores et bien équilibrés, la Suite en fa, qui reste une des meilleures réussites de la dernière période de production d’Albert Roussel. Musique vivante, à arêtes vives, bien de chez nous, qui forme un contraste tranché avec le langage boursouflé de la Cinquième Symphonie de Tchaikovsky, à laquelle M. Sydney Beer et le National Symphonie orchestra se dévouent avec le zèle le plus méritoire. Et voici qu’il me reste bien peu de place pour signaler aux pianistes un intéressant enregistrement de la Sonate en mi bémol majeur de Schubert, dû à Mme Kathleen Long, et, aux chanteurs sensibles et musi-ciens, le disque de l’Horizon chimérique de Gabriel Fauré, où M. Gérard Souzay, dûment secondé au piano par M. Michel Damase, donne la mesure de la qualité de ses dons vocaux et expressifs. GUSTAVE SAMAZEUILII.