BOURDELLE ET LI JEUNE SCULPTURE par Jean DANIIEN N parle beaucoup d’Antoine Bourdelle depuis O ces dernières semaines. L’art du grand sculpteur disparu vient de s’épanouir dans de ravissants petits bronzes groupés par le musée des Beaux-Ans de la Ville de Paris. De son côté la veuve du créateur de l’Archer Héraclès emploie toute son activité pour que Bourdelle occupe la place qui lui revient dans l’art français. Elle vient de léguer à la Ville de Paris l’ensemble des ateliers où dans la rue du Montparnasse, qui depuis long-temps déjà porte son nom, l’artiste travailla pen-dant plus de quarante ans. Il y avait à Paris et aussi à Meudon un musée Rodin. Bourdelle désormais aura le sien. Le cadre où s’épa-nouissent près de huit cents sculptures et de quinze cents dessins est merveilleusement vivant. Tout y est intact. Voici la devanture de la boutique où M. Bourdelle père, ébéniste, fabriquait ses meubles. Voici la dernière oeuvre du maître c’est une figure de femme d’une grande puissance. Voici sa table, son lit, ses instruments de tra-vail. On a l’impression qu’il va entrer d’un instant à l’autre et guider le visiteur de salle en salle. Chaque oeuvre capitale réalisée par le sculpteur, le Mickiewicz, le Beethoven, l’Archer ou le Général Alvear, a une salle pour elle. Dans le jardin un extraordinaire Rodin à barbe fluviale compte parmi les plus beaux morceaux du sculpteur montalbanais. Ici, pendant des heures, le visiteur suivra l’évolution d’un maître qui avait étudié toutes les techniques du passé et fut vraiment lui-même dans des bustes admi-rables, comme celui de l’Enfant Cognacq. Depuis que le musée est ouvert les visiteurs affluent, surtout des jeunes. Mu. Bourdelle les guide elle-même, poursuivant ainsi l’oeuvre éducatrice qui passionnait son mari. Ce lien spirituel reliant Bourdelle aux sculpteurs de la génération montante apparaît plus nettement encore quand on regarde en détail l’exposition orga-nisée par notre confrère Waldemar George à la Maison de la Pensée française sous ce titre : la Sculpture en France, de Rodin à nos jours. L’Archer Héraclès est peut-être la pièce capitale de cet ensemble en partie disposé dans un jardin. La présentation intelligente de cent sculpteurs français nous permet de faire le point sur un art splendide qui ne bénéficie pas habi-tuellement de la même publicité tapageuse que la peinture. A côté des grands morts comme Bourdelle, Rodin, Despiau, Maillol, Malfray, Lucien Schnegg, Pompon, Joseph Bernard, Jane Pou-pelet on voit s’épanouir de beaux tempéraments comme Gimond, Couturier, Zadkine, Auricoste, Brancusi, Ger-maine Richier, Parayre, qui ne poussent jamais l’au-dace jusqu’à perdre de vue le sens du réel. Dans un juste esprit d’éclectisme on a exposé ici toutes les ten-dances. Il y a des tradi-tionalistes comme Dideron, Collamarini, Dejean, Ray-mond Martin, Kra. ; il y a des gens d’avant-garde comme Pevsner, Knoop, Chauvin, Laurens. Il y a aussi des fumistes charmants, tel Calder, dont les Mobiles n’ont qu’une parenté lointaine avec la sculpture. On notera qu’une figure de Picasso possède des qualités de pondération, de gravité, de puissance qu’on aimerait rencontrer dans toutes ses dernières recherches picturales. din, par Bourdelle. Photographies fludomine. par P J. D. 73