On n’a jamais connu son architecte, ce devait être le dieu des armées lui-même. Peinte en dedans de toutes les vives couleurs, elle est peuplée de prophètes, de saints, d’anges et de démons qui s’ébattent dans une flore d’argent et d’or, et sa voûte brille au travers, haute, inaltérable et bleue comme les voûtes éternelles. Enraciné par des souterrains, des oubliettes, l’archevêché pousse aux bords mêmes du Tarn, le vieux Taro gallo-romain. Ses tours montent, cylindriques, surabondantes, gorgées d’eau vive et de terre grasse et n’offrant à l’ennemi que de terribles surfaces en pente douce tout unies a desquelles nul ne se devra savoir venger « . a O quel bel, quel riche froment nous est advenu ! — Il n’est pas laid… il n’est pas pauvre », disent les gens. Maintenant, Albi, qui, de par la terre rouge de ses champs, la chaux de ses carrières et le charbon de ses mines, pourrait aussi bien se nommer : Alba, Rosa, Migra, Albi, ayant, au cours des siècles, rompu ses remparts comme une digue, s’est répandu dans la plaine. Le Tarn y prend ses coudées franches, y roule d’une hanche sur l’autre, avantageant les jardins potagers et faisant pommer les oignons de Lescure. Mais, dans la ville, il est bien forcé d’en passer par où l’on veut et de filer doux entre deux rangées de maisons, sous ses trois ponts, dont l’un, celui du milieu, le pont Vieux, date de l’an 5003. C’est du haut du pont Neuf qu’apparaît le grand aspect de la cité. Le Tarn, du côté des champs, arrive, vert dans ses beaux jours, rouge de colère en temps d’orage ; de l’autre côté, s’érigent, le pied dans l’eau, le vieux faubourg de la Madeleine et, à gauche, soutenu pat son vieux rempart, s’alignant en haut du quai de Choiseul, le vieil Albi, ses murs, ses tours, ses arcs, ses campaniles, ses toits de tuiles romaines, sa cathédrale, son archevêché (devenu le musée Toulouse-Lautrec). Tout l’antique Albi de brique enflammée et massive, dans toute sa magnificence. La ville actuelle, au bout de l’escalier des Lices, s’étend, entourée de rues, de lieux-dits, qui parfois en disent long : Croix-Verte, Croix-Blanche, Croix-Rouge, Pâtus-Crémat, s’étend avec ses cafés, ses magasins, ses monuments municipaux, autour de la place du Vigan et des promenades où tant de gens, à certaines heures, vont et viennent, pour disparaître tous en même temps, faisant alors de ces lieux sur-peuplés deux déserts : l’un verdoyant, l’autre infertile, où seul s’érige sur son piédestal La Pérouse — ce grand explorateur qui un jour repartit à l’aventure et… Sur la route du Castelviel. Si loin s’en alla Qu’il fut changé en bronze Et bronze retourna. L’arebevérbé, aujourd’hui musée. Le dodu de Saint-Sale. Le faubourg de la Madeleine.