UNE 1101IE 1,01611… … en raccourci DANS la future mode d’hiver, la jupe, vedette, gagne de plusieurs longueurs sur ses concurrentes du passé. Ce n’est pas tout à fait une surprise, car certaines collections de printemps avaient amorcé le plongeon. Mais accent et généralisation font actuel-lement révolution. Les recherches se sont portées sur les quelques centimètres qui séparent le mollet de la cheville. Là où il y a le moins d’audace, les jupes sont à 32 centimètres de terre (elles étaient à 45 centimètres il y a moins de deux ans), longueur « la plus courte » qui, dès le matin, s’imposera. A partir de 5 heures du soir, l’ourlet s’abaisse à 25 centimètres et même à 20 pour arriver, à l’heure du cocktail, à 15 centimètres et quelquefois à 10. Là se rejoignent, autour des chevilles, les robes dites d’avant dîner et celles dites de dîner. Bien subtile est la différence; pour la découvrir, il faut lever les yeux jusqu’au col, qui disparaît ou s’ouvre vers 9 heures, allant quelquefois jusqu’à dégager les épaules. La robe dite du soir, pour suivre le mouvement, s’adjoint, elle aussi, quelques centimètres de plus, qui viennent se poser souplement sur le sol. Sonnette, zouave, entonnoir, quenouille, figure de proue, corolle, fuseau, cloche ou sifflet, autant d’images aux contours précis et familiers dans lesquelles s’inscrivent les lignes nouvelles. C’est l’ampleur jouant autour des jambes, tantôt réduite, tantôt volumineuse, qui, en définitive, par la place qu’elle occupe, décide de la ligne. Comme son image l’évoque, la figure de proue, chez Lucien Lelong, chasse toute l’ampleur en arrière. Plissée, froncée, drapée, elle ne veut rien avoir à faire sur le devant de la robe, qui reste plat. Chez Christian Dior, la corolle s’épanouit tout autour, en tulipe, déployant sa grâce à l’aide de longs métrages de tissus. Ne parle-t-on pas d’une robe qui a 40 mètres de tour et 120 mètres d’ourlet ! Une silhouette étroite s’oppose à l’autre, silhouette tige dont le dos s’ajuste absolument au corps. Chez Jacques Fath, des épaules o naturelles », un buste ajusté, des hanches en dôme amorcent la ligne quenouille, qui se resserre aux mollets. Deux lignes s’opposent chez Pierre Balmain : la cloche, très ample aux hanches sans l’aide d’aucun artifice, et le sifflet, laissant la silhouette droite et serrée à partir de la taille, alors que les épaules sont larges et souples sans« puddings». C’est à la ligne zouave que Jean Dessès emprunte toute la souplesse du dos de ses robes de crêpe noir, très ajustées devant. Chez Robert Piguet, l’ampleur, sur le ventre, dessine un S ou s’épanouit toute ronde, en entonnoir. Plissée menu chez Marcel Rochas, la jupe y est plus longue qu’ailleurs. Dès le petit matin, sous le sweater guêpière, elle s’allonge à 20 centimètres de terre, comme en 1922. Les après-guerre ont de ces réactions, sensibles jusque dans le domaine de la mode. La belle part ainsi donnée à la jupe, qui semble avoir capte: tout l’intérêt pour cette saison, un petit mot sur les corsages, redevenus pudiques à l’excès. Entr’ouverts quelques saisons, à la joie de certaines, ils se referment au ras du cou, boutonnés haut. Sur les épaules ne se dessine plus la couture, qu’il faut chercher sur le devant, dans le dos ou sur le bras ; la manche kimono ou raglan a pris la place de la manche montée et accentue la rondeur des épaules, laissées à leur inclinaison naturelle. Les beaux tissus sont revenus : en laine, soie ou rayonne, ils ont retrouvé leurs qualités d’avant guerre et n’ont plus cet aspect pauvre que les couturiers durent dissimuler, des années durant, sous une ligne dite o à la paysanne ». Le velours et surtout le satin mat ou brillant seront de toutes les « cocktail parties ». Noir, vert bronze, gris acier, cuivre, rouge minium, parme sont les coloris dominants. Skunks, loups, marmottes, renards ont traversé les mers pour venir orner de nouveau les manteaux de lainage. Cols châles souples, poignets et bordures participent à la tendance « cossue» de la mode. Chapeautant la silhouette nouvelle, un peu alourdie par la fourrure et l’ampleur des tissus, des bonnets, des coiffes, des calottes:três brèves font un tout avec la tête, de plus en plus réduite par la coiffure relevée de dos ou de côté. M. G. P.