SUR « LE MAITRE DE SANTIAGO » par HENRY DE MONTHERLANT Avec une rare unanimité, l’opinion et la critique ont reconnu que la Reine Morte était une oeuvre magistrale. D’emblée, Henry de Montherlant se classait comme un grand dramaturge. Il présenta ensuite Fils de personne, mais il avait écrit, auparavant, Pasiphaé, puis Port-Royal : cette dernière pièce, non encore jouée ni éditée, projettera sans doute sur le jansénisme une curieuse lumière. Plus récemment, Henry de Montherlant a publié le Maître de Santiago, au sujet duquel M. P.-A. Touchard, administrateur de la Comédie-Française, déclarait au Figaro : « C’est une des pièces les plus remarquables de notre époque et il serait regrettable qu’elle ne fut pas montée par nous. o L’auteur va donner ici quelques commentaires ou précisions sur cette pièce dont nos lecteurs trouveront ensuite une brève analyse et un extrait. PLAISIR DE FRANCE. L’œuvre de Dieu est une œuvre de mort et non de vie. (FépeLop. Lettres spirituelles.) UN critique anglais a appelé le Martre de Santiago r une chose infiniment française, où l’Espagne ne passe que par le vieil accent de Corneille r. Et, dans les notes de cette pièce, qui la font voir sous divers éclairages, j’ai marqué moi-même que j’avais habillé un peu à la française mes héros castillans. Ces trois actes se passent dans une Castille rêvée. Le théâtre espagnol du siècle d’or est à l’extrême opposé d’une certaine idée que nous nous faisons de la Castille de cette époque. Où nous rêvons austérité, rigueur, dépouillement, pureté, il est redondance, faux brillants, préciosité, fatras. Ce n’est pas la première fois qu’une nation voit sa meilleure image construite par l’étranger. Mon héroïne, Mariana, est une fille de Port-Royal, une sœur cadette des soeurs Christine Briquet et de Brégy. Don Alvaro, son père, est un des messieurs par maint endroit ; notamment, il n’est 21