leur vernis brillant comme glace. Aussi a-t-on mis sur le mur opposé aux fenêtres les Greco et les Goya. Au Musée d’Art Moderne par contre, quai de New-York, la sculpture est présentée dans des salles qui reçoivent, comme il sied, l’éclairage par les côtés. Mais ici les statues végètent entre les fenêtres, dans l’ombre des trumeaux qu’ils souhaitent malencontreusement d’orner, afin que l’on ne puisse deviner surtout, en aucun cas, les modelés de la sculpture. Contre les murs de face, on a placé des bancs et d’étranges vitrines de bois peint, faites davantage pour foetus ou tœnias en bocaux que pour les émouvants souvenirs qu’elles con-tiennent. Les protestations sont inutiles. Les conservateurs n’ont pas de temps à perdre pour les écouter. Ils restent invisibles, les bancs dans la lumière et les statues dans l’ombre. Une manutention de quelques heures suffirait pour tout arranger et voilà des années que cela dure. La seule partie du Louvre qui ne reçoit qu’éloges, d’ailleurs mérités, est celle où sont présentées les hautes époques de l’antiquité assyrienne, persane, cypriote, etc… Car il n’est pas jusqu’à la sculpture moderne où l’on ne soit déçu. Le funeste « classement chronologique » a relégué dans le vestibule d’entrée les plus magnifiques pierres des XII., et siècles avec le Christ de Courajod et autres merveilles, pour aboutir, dans les plus belles salles, au lamentable académisme des XVII » et XVIII » siècles. Ne pouvait-on aussi bien remonter la pente ? L’effet eût été beaucoup plus saisissant et le besoin d’ordre également satisfait. Mais quelle bombe atomique parmi nos classificateurs! Enfin, croirait-on que ni le Musée de Bayonne, ni le Musée de Montauban, qui contiennent, sous la protection de leur municipalité, des milliers de dessins des plus grands maîtres et les plus beaux dessins d’Ingres, n’ont pas encore été « classés » par l’État? On croit rêver. Et cela faute de crédits pour payer correctement des conservateurs dignes de ce nom. Bref, il conviendrait d’élargir les commissions et conseils de nos musées; d’y adjoindre ceux qui, par le livre, l’ébauchoir ou le pinceau modifient aujour-d’hui le sens même de la vie contemporaine et savent seuls ce qu’il convient de placer dans les «tribunes » ou les réserves. En un mot, doubler, tripler dans les Conseils de nos Musées nationaux, le nombre des artistes dont l’in-fluence sur l’art présent est internationale, apportant ainsi l’élément vivant, le bouillonnement de sève, le dynamisme qui manque à la science par trop sta-bilisée de nos plus chevronnés « muséologues ». Et la Cour des Comptes, qui sait si bien dévoiler les gabegies et faire châtier les lampistes, aurait peut-être meilleure figure si, au lieu de s’acharner sur d’excellents fonctionnaires des Beaux-Arts, elle avait insisté davantage sur les véritables scandales. Car, des Beaux-Arts, qui se débattent dans la misère, le budget qu’on leur dispense étant ridicule, on ne pouvait, le cas échéant, détourner que des miettes. Et c’est encore à nos artistes que la France doit le meilleur de sa gloire. LE DÉCOR D’AUJOURD’HUI e(40. I _ P. S. Nous avons appris avec plaisir qu’à la suite de nos articles concer-nant l’Ambassade de France à Londres, la décoration de ce palais n’est plus confiée à un seul antiquaire. La consultation s’élargit. Souhaitons qu’elle s’étende bientôt jusqu’à nos meilleurs maîtres de la décoration contemporaine. 26