ESPOIRS ET REGRETS EN guise d’épilogue, le Rapport de la Cour des Comptes a eu le joli résultat de priver nos Beaux-Arts de deux serviteurs d’une exceptionnelle qualité : l’un, directeur des Arts et Lettres, l’autre administrateur du Mobilier National. On sait que ce sont toujours les lampistes qui causent les catas-trophes. Cette fois, nos lampistes tenaient haut le flambeau. Ils n’en ont pas moins été injustement frappés. Pouvons-nous leur assurer respectueusement qu’ils emporteront dans leur retraite ou dans leur nouveau poste les regrets et l’affection des artistes qu’ils ont si bien servi. Nos musées, qui n’ont jamais été aussi clairs, aussi frais, aussi pimpants, n’ont été, non plus, jamais autant critiqués. « Le Figaro littéraire » mène la campagne et demande à de très importantes personnalités du monde des Arts leur avis sur l’actuelle « muséologie ». Contre les nouvelles présentations du Louvre, des critiques, dont certaines fort graves, ont été formulées, lesquelles prennent une valeur d’autant plus grande, un poids d’autant plus lourd, que la célébrité de leurs auteurs est plus étendue et de meilleur aloi. Dunoyer de Segonzac regrette l’ancien Salon Carré et proteste contre l’éclairage incorrect des chefs-d’œuvre espagnols qui s’y trouvent, cependant qu’André Lhote s’in-surge contre l’envahissement des cimaises de la Grande Galerie par des toiles italiennes du XVII, siècle dont l’académisme n’intéresse plus personne. A vrai dire, ce que l’on considérait comme chefs-d’oeuvre au temps de Bouguereau ne l’est plus dans une époque où Picasso, Braque ou Derain mènent le train. La sculpture nègre, dont le British Museum fait si grand cas, n’a pas encore accès au Louvre. Vérité en-deçà des Pyrénées, erreur au-delà ? Ou nos conservateurs sont-ils trop… conservateurs tout en négligeant, selon certaines opinions auto-risées, de conserver ? La France officielle, qui a déjà raté la collection Wallace faute d’un bout de ruban rouge, va-t-elle continuer, restant dans sa tour d’in-compréhension, à ne pas voir que la beauté change de visage, évolue, vit enfin ? Et le Musée Imaginaire que construit Malraux au cours de son étonnant périple à travers « La psychologie de l’Art », où il observe et explique de façon si lucide le bouleversement des valeurs auquel nous avons assisté depuis cinquante ans, n’aura-t-il de résonances qu’à l’étranger ? Le monde entier a les yeux fixés sur nos artistes, sur cette École de Paris qui dicte ses principes à toutes les autres écoles. Le Louvre peut-il l’ignorer, continuant à sacrifier des vingtaines de mètres de cimaise dans la Grande Galerie à Carrache ou Guido Reni, lesquels n’ont plus aucune affinité ni lien avec nos peintres d’aujourd’hui, ne parlant plus, pourrait-on dire, le même langage ? Au Louvre, on a ouvert les fenêtres du Salon Carré pour y présenter de la peinture. Or chacun sait que la lumière de face est désastreuse pour les tableaux, 26