LES EXPOSITIONS PAR MAXIMILIEN GAUTHIER LES Femmes artistes modernes (Maison de France); Tal-Coat (Billiet) ; Paul Colin, Simone Marye (Art et Décoration) ; Boris lasikoff (Bernheim-Jeune) ; Bertrand Py (Marcel Bernheim); Henri Forge (Durand-Ruel) ; Zingg, Gimmi, Monique Jorgensen (Druet) ; Holy, André Tzanck (Simons.) ; Yvonne de Coppet (Garbo); Hélène Marre, Valentine Welter (Crémaillère) ; Hanny ltkiewicz (Art et Artis-tes polonais); Dessins (Le Groupe Moderne); Paul Maze (Georges Bernheim); Hayden, Pelaez del Casai, Lobeck, Schemp (Zak); Jac-ques Nervat (Le Balcon) ; Breuillaud, Neillot (Spéranza) ; Dante Vincelle, Jeanne Besnard•Fortin (Carmine); Ellis Wallin, Favory (Bar-reiro). Mme Marie-Anne Camax-Zcegger a fort bien fait d’associer, pour une exposition annuelle de leurs oeuvres, les femmes artistes peintres, sculpteurs et décorateurs modernes, c’est-b-dire libérées du préjugé académique, et manifestement décidées à rechercher, dans la pratique de l’art, autre chose qu’un aimable passe-temps. Cette exposition. remarquablement organisée, étant l’occasion d’un très brillant vernis-sage, on peut dire que Mme Marie-Anne Camax-Zcegger a réussi a doter la saison parisienne d’un agrément de plus. D’autre part, il n’était sans doute pas inutile d’entreprendre de démontrer, chaque année, qu’il ne convient pas de confondre le féminin avec l’efféminé. Dans son curieux livre sur l’EvolutIon de la Sexualité, le D. Gregorio Maranon, loin de nous autoriser b considérer les travaux artistiques comme constituant un type d’activité proprement masculine, prouve. au contraire, par A plus B. que l’homme qui s’y livre esta considérer comme une sorte d’inverti psychique, caractérisé par  » des traits correspondant à l’activité sexuelle secondaire de la femme princi-palement le goût et l’aptitude pour l’arrangement, la décoration et les soins domestiques, qui sont si typiques chez les eunuques « . Ainsi, dans le domaine de l’art, c’est nous qui serions les intrus, et non pas elles. Ce n’est pas la femme artiste qui s’aventurerait a » faire l’homme », c’est nous qui manifesterions (encore que parfaitement virils sous tous autres rapports et corrects dans notre conduite) une psychologie nettement féminoide. Mais laissons ces hauts et délicats problèmes pour reconnaitre, simplement, que l’exposition des femmes artistes modernes, a la Maison de France, regorgeait d’admirables ouvrages et que Mme Marie Anne Camax.Zcegger mérite d’être félicitée pour avoir su, avec autant de discernement que de courage, opérer une véritable sélection, A la Galerie Billiet, Tal-Coat, dont l’oeuvre comporte déjà plusieurs époques, a montré une série de toiles nouvelles qui marquent une nouvelle étape de cet attachant artiste vers la plus saine peinture, caractérisée par la franchise du sentiment et la clarté de l’expression. Ses productions de début, inspirées par le folklore breton, dégageaient un puissant mystère. Tal-Coat, au risque de décevoir ses premiers admirateurs, s’est peu à peu débarrassé de tout esthétisme, de tout esprit de licence et de paradoxe pour se consacrer à peindre des tableaux remarquables sous le rapport de la plénitude des volumes, de la composition robuste, de la densité du coloris, c’est-a-dire entrer dans la voie — où je présume qu’il ira loin — d’une authentique poésie picturale. Pour son inauguration, la nouvelle Galerie d’Art et Décoration a présenté un ensemble d’oeuvres de Paul Colin et de Simone Marye. Si les célèbres affiches de Paul Colin sont, pour la plupart, d’éton-nantes réussites de synthèse, l’esprit d’analyse domine, au contraire, ses peintures volontairement sobres de ton, scrupuleusement privées du prestige de la couleur. Les sculptures de Simone Marye, bronzes et tailles directes, allient à la justesse de l’observation la délicatesse du goût, et même, dans certains morceaux, une réelle puissance décorative. Chez MM. Bernheim-Jeune, exposition posthume d’oeuvres de Boris lasikoff, dont le modernisme prenait sa source dans la magnifi-cence, haute en couleurs, des arts de la vie en Russie avant le XVII. siècle. A la Galerie Marcel Bernheim, peintures de Bertrand Py, grises. 268 intimes, suaves, apaisantes, sous le signe d’une distinction sans rigueur, chaleureuse plutôt. A la Galerie Druet, paysages de Franche-Comté, d’Auvergne, de Paris, d’lle-de-France, de la Bretagne, du Morvan, de la Picardie, de la Bourgogne, par J.-E. Zingg, qui compose comme un classique et travaille, pense, sent, comme un bon artisan de nos campagnes. Raf. finements coloristes de Gimmi ; et rêveuses évocations de vieilles demeures, par Monique Jorgensen, à l’aquarelle. A la Galerie Simonson, gouaches sur la Norvège, par Adrien Holy dont j’ai signalé, ici-même, le mois dernier, les exceptionnels mérites peintures par André Tzanck, d’un art sérieux et fort. A la Galerie Gerbo, fins portraits d’enfants, paysages des plus divers quant aux motifs, dessins pleins de conscience, par Mme Yvonne de Coppet, peintre non sans charme. A la Crémaillère, gouaches sensibles d’Hélène Marre, accompa-gnant les frais bouquets savamment composés de pâtes alimentaires choisies et coloriées par Valentine Welter, et que Deveria eût mis, sans hésiter, au corsage de la soeur des anges. A la Galerie Art et Artistes polonais, opulentes natures mortes par A. Hannytkiewicz. Constitué par Lucie Caradek, le Groupe Moderne a présenté un très remarquable ensemble d’une centaine de dessins, dus à Roland Oudot, Zina Gauthier, Jahl, Mezerowa, Henry Ramey, Marie-Louise Siméon, Claire Volière, Madeleine Vaury, Bardon, DarH, Delatousche, etc., et augmenté d’une section de sculpture et d’art décoratif où j’ai particulièrement noté des oeuvres de Sébir et les nobles reliures d’Anita Conti. Chez Georges Bernheim, révélation de Paul Maze, l’Alphonse, Legros de sa génération, qui a fait sa carrière à Londres OÙ il est justement célèbre, et qu’appréciaient déjà, ici, Segonzac, Boussin. gault et Simon Lévy. Paul Maze demeurera comme un des meilleurs représentants de cette école havraise qui nous a donné Boudin, Monet, Dufy, Friesz et dont Villeboeuf, dans une généreuse et lucide préface, dégage les caractéristiques: amour de l’eau, du reflet, de la fluidité atmosphérique, tonalités blondes ou grises finement moche tees, agilité dans l’exécution. A la Galerie Zak, peintures récentes de Hayden, savoureuses de couleur dans une soyeuse matière. D’Amelia Pelaez del Casai, artiste sud-américaine présentée par Francis de Miomandre, tableaux graves et plantureux, où règne un sentiment religieux de la vie: tout un mondefermé,complet,hanté,écrit Miomandre, d’un énigmatiquesilence. A la même Galerie, brillants panneaux du Suisse Fritz Lobeck, obtenus grâce à un procédé particulier à cet artiste et qui, joignant aux commodités de la technique de l’huile l’éclat de la peinture à l’oeuf, mériterait d’intéresser décorateurs et architectes. Fritz Lobeck, dont les compositions ont un caractère monumental, est, en outre, un lyrique de la couleur. Chez Zak encore, les peintures, dessins et sculptures de Théodore Schemp sont également à signaler. Au Balcon, dessins, par Jacques Nervat, images de la terre, de la mer et du ciel, senties par un poète et transposées en noir et blanc avec une sereine autorité. A la Galerie Spéranza, peintures de Breuillaud, fougueux et fin coloriste, que Rubens et Soutine exaltent tour à tour cherche encore sa voie, mais non sans magnificence un jeune qu’il convient de suivre avec une sympathique attention. A la même Galerie, Louis Neillot, plus sobre mais aussi plus sec, construit des paysages et des natures mortes qui ont du poids et de l’accent décoratif. A la Galerie Carmine, première exposition à Paris de tableaux et de dessins dus a Dante Vincelle, Italien innocent de toute affectation artiste, et qui produit, avec un naturel parfait, des images pures et solides, capables d’évoquer, sans le savoir, les saints primitifs, anciens et modernes, de Paris et des Flandres. A la même Galerie, bons pay-sages de Jeanne Besnard.Fortin, mis en page sans maniérisme, et délicats dans les lointains. A la Galerie Barreiro, substantiels et blonds paysages d’Ellis Wallin ; et hymnes b la vie, la chair, la santé, les étés, par notr cher, grand, héroique André Favory.