ED. BILLE — LES VIGNES EN MARS La Peinture de Paysage alpestre C’EST à Giotto di Bondone (1266-1337) que l’on doit en peinture, à proprement parler, les premières représentations de l’Alpe, c’est-à-dire d’un certain caractère alpestre. Et lui, l’an-cêtre, devait ressentir toute la sauvagerie et toute la terreur de la montagne qu’il invoque comme un lieu de souffrances oit le Christ rencontre des damnés que des diables torturent, et le roc fantas-tiquement découpé sur fond d’or, devient presque héraldique. Dès lors, la chaîne des monts ne cesse d’appa-raître et dans les tableaux des primitifs allemands et dans ceux des maitres italiens, mais toujours elle ne figure qu’en tant que détail accessoire ou fond, zone transitoire, claire ou sombre, de ce bleu verdâtre des paysages conventionnels. Peu à peu, aux lignes molles succède une observation plus nette, les parois de rochers s’accusent, les pics s’élancent. Chez Léonard de Vinci, par exemple, le caractère s’accentue, il semble avoir eu conscience de I’« âme » de la montagne. Alors la montagne ainsi comprise devient le corollaire des figures, elle est l’accompagnement des énigmatiques sourires, l’écho de l’âme dans un autre monde. Sombres chez s Mono Lisa », claires, ensoleillées dans le bleu transparent de la « Vierge à l’oeillet », les cimes subsistent, comme la mélodie nécessaire qui chante en sourdine. Ce thème re-vient toujours, dans le portrait de femme de l’Er-mitage comme dans le Saint-Jérôme. De ténu ou de subtil il devient fantastique dans les « Vierges aux Rochers »,voûte de rocs entassés, lieu magique 264