COURBET ET SON INFLUENCE A L’ÉTRANGER SZIAPIil — LE PIQUE—NIQUE flatteuse et, en novembre 1869, il partit pour Paris. Courbet l’accueillit avec bienveillance et l’intro-duisit dans son cercle d’amis. Il venait souvent le surprendre au milieu de son travail, pendant qu’il peignait la Courtisane et la Vieille Femme de Paris. Leibl lui-même raconte que Courbet lui tapait volontiers sur l’épaule et lui serrait la main, en voyant combien il le comprenait et quels progrès il taisait. Leibl passa une année à Paris, mais, quand la guerre éclata au mois de novembre 1870, il dut revenir. Pendant cette période, il avait achevé huit tableaux, preuve qu’il travaillait avec une véritable passion, ainsi que le voulait Courbet, pour qui la peinture était un « métier d’enragé ». Il parla toute sa vie avec adoration de ce séjour passé auprès »le Courbet ; et quand il apprit le sort infortuné du maitre, il porta son deuil dans son cœur; souvent, il rappelait avec quelle injustice les Français avaient traité leur plus grand artiste, en le compromettant dans l’affaire de la colonne Vendôme, en l’exilant et l’excluant des expositions (sur la proposition de Meissonnier), si bien que le maître, installé en Suisse, n’en avait pu supporter davantage, s’était adonné à la boisson et avait expiré le 31 décembre 1877 à Tour de Peilz, au bord du lac de Genève. Le jeune Leibl, à peine débarrassé de la pous-sière de l’Académie, avait subi l’influence directe d’un grand artiste pleinement évolué et il est fort naturel que cette influence ait été décisive sur toute sa vie. Je ne parlerai ici que des faits culminants de sa carrière, mais dans mon livre (1), je fais une analyse très détaillée de sa technique. Tout ce qu’il a appris à Paris est synthétisé dans ses études et plus précédemment dans une de ses œuvres : Deux Finassa de Dachau. Son coup de pinceau est encore ici flou, indécis, morcelé, et beaucoup plus vague que celui de Courbet ou de Munlacsy, mais il est large, sug-gestif de la forme et de l’unité. L’ensemble aboutit à une très fine peinture de tonalité, mais plus variée ; il ne ramène pas tout à des ombres noires. Il est en cela plus moderne que Munkacsy dans son Dernier Jour. Le troisième artiste, Szinyei, après avoir fait la connaissance de Courbet, devint aussi un peintre de ton, réaliste, observateur de la vie. Il composa des paysages traités largement comme ceux de Courbet, niais perdant son travail il lui arriva de faire une observation singulière : c’est que nulle part en plein air il n’avait vu cet enveloppement (1) A paraitre incessamment chez Floury. 29