FÉLIX VOULOT l’expression. Il déteste la grimace, il ne la prend pas pour le caractère. De même, au temps de ses premiers essais, il a eu la passion du mouvement, comme tous les jeunes gens ; mais il va de plus en plus aux mouvements secrets que la paix enve-loppe, aux sentiments qu’ordonne une pensée supérieure et qui trouvent une sorte de calme à se contempler. Enfin, plus il s’attache à la nature, plus il tend à choisir entre les objets. Il est difficile pour lui-même ; il ne dérobe pas ses propres oeuvres à l’extrême sévérité de son goût : je ne sais qu’un autre homme, dont le goût, en art, soit également ombrageux et infaillible. Il ne se con-tente pas du premier coup. Il ne croit pas avoir assez fait, s’il offre aux yeux une ébauche informe. Parce qu’il -a l’amour et le respect de la forme et la conscience de son art, un croquis en sculpture ne lui suffit pas. Ni même cette habileté, qui sert de talent à tant d’autres, qui est un peu du costume et du couturier: ni corps, ni draperie là-dessous. Les charmantes draperies de Voulot sont sincères. La vraie draperie ne dissimule pas le nu: elle le révèle. Bien trop fidèle à la nature pour la corriger, il cherche l’expression idéale du modèle qu’il imite. J’aime en lui deux vertus, assez rares l’une et l’autre, mais plus rares encore d’êtres réunies le sens décoratif et le sens de la vie intime. Comme un classique, il répugne au morceau ; il met d’abord la force d’art dans l’invention d’une belle ordonnance. Il ne conçoit pas l’arabesque sans le sentiment qui la fait vivre. Ainsi, il tient bon contre la grande hérésie, renouvelée de la Renaissance, comme si l’on pouvait réduire l’oeuvre d’art à n’être qu’un jeu de lignes heureuses! Comme si la beauté de la phrase pouvait se séparer totale-ment de l’idée qu’elle exprime ! La pensée sans la forme n’est pas plus le poète que le sculpteur. Mais il n’y a de forme véritable que d’un sentiment. Une pensée de sculpteur n’est pas seulement un instinct, mais un sentiment profond de la forme. Le virtuose n’est pas l’artiste. Mesure et probité délicate. Rien de morbide en cet art, où rien pourtant n’est grossier, ni d’une touche commune. Il a la santé du coeur. Il aime l’élégance au points d’être un peu précieux, çà et là. Patient comme un artisan, à la vieille mode, on sent qu’il a beaucoup dessiné. Il a le dessins si naturel qu’il n’esquisse plus, je crois, ses figures sur le papier il modèle en même temps qu’il imagine. On dirait qu’il fut apprenti à Tanagra, près Pantin, à voir ses danseuses et ses statuettes de jeunes femmes : élégantes, aisées, les jolies com-pagnes pour vivre à la maison et pour la prome-nade! Si, parfois, la forme est grecque, le sentiment ne l’est jamais. Elles sont bien d’ici, ces vives belles. l’hot . Yi,urono. GRANDE MATERNITÉ: Leur joie n’est pas une ivresse de l’imagination ou des sens. Elle n’a point la fureur en sang des bac-chantes, ni la sérénité formidable des dieux. Elle est française et non antique. Eût-elle fait le voyage de Tanagra et de Florence, la forme de Voulot vient de Paris et de Chartres, consiste la divine figure de la Synagogue, à la cathédrale de Stras-bourg, qui est assurément d’un Français, né dans Ille, sinon même d’un imagier beauceron. Jeunes mères et danseuses de Voulot, toutes elles sont les strophes du même poème les heures de la femme. La danse et la maternité nouvelle, les deux âges de la femme dans l’amour. Il n’y a presque pas d’hommes dans son oeuvre. Rien de plus chaste que ses nus. Mais la chas-