LA PEINTURE FLAMANDE avec un Cantique de Noèi, exposé en 1867. Ce sujet, il devait le reprendre d’une façon magistrale en 1894 lorsqu’il peignit le Chant de MO, conservé au musée de Bruxelles. C’est dans un paysage clair et vrai que se déroule la scène naïve comme un ancien mystère.A droite s’avancent un peu gauches des villageois aux types frustes, offrant l’agneau, leur modeste présent, tandis que des femmes et des enfants chantent devant la Mère et l’Enfant. A gauche, à travers le réseau léger des arbustes dé-pouillés par l’hiver, planent à l’avant-plan les formes radieuses, presque preraphaéliques, d’anges diaphanes couronnés de roses, dont l’un effleure de ses doigts un théorbe… Et cette composition, si conforme à l’esprit des Adorations des Ber-ers primitives, plaide hautement par son caractère à la fois mystique et. réaliste en faveur de l’enseignement et de la pensée artistique du vaillant peintre qui a su débarrasser si complè-tement l’école d’Anvers actuelle de ses bruns et de ses bitumes tradition-nels. Nous ne pouvons, comme nous le vou-drions, passer en revue dans ce simple résumé l’ceu vre très considérable de Juliaan Devriendt. Il faut citer cependant en-core son impressionnant tableau La Veillée de sainte Cécile et 1.a Fille de Jarre, du musée d’An-vers. Cette dernière toile nous rappelle les études que l’artiste fit en Pales-tine, pour situer et reconstituer dans un décor vrai les scènes émouvantes de la vie et de la mort du Christ. A côté de ses œuvres empruntées aux légendes du pays de Flandre, il nous faut rappeler une autre manifestation bien flamande de son art: ce sont ses portraits, si bien individualisés et fouillés, que l’artiste exécute encore avec un succès croissant. Albrecht Devriendt, qui, avant son frère, avait rempli avec non moins d’autorité les fonctions de directeur de l’Académie d’Anvers, fut également un enthousiaste de l’art de nos grands primitifs. Si, à son origine, l’esthétique de Juliaan nous rappelle é les grâces élyséennes d’un Memling n, comme le dit si bien Camille Lemonnier, celle d’Albrecht s’inspire plutôt des van Eyck, dont les Devriendt aimaient à revoir avec leur père, Jean Devriendt, leur initiateur, le chef-d’oeuvre de l’Adoration, conservé à Gand, leur ville natale. Le choix de ses sujets nous montre ses prédilec-tions. Elles le portent vers les scènes historiques héroïques Charles-Quint au Convent de Saint-Juste (1874); l’Excommunication de Boncbard d’Avesne (1883); Comment ceux de Gand rendirent hommage à Charles-Quint enfant (au musée de Bruxelles, 1885), etc. Mais c’est surtout dans des fresques plus récentes, notamment dans celles de l’hôtel de ville de Bruges, qu’il sût le mieux, et d’une façon si personnelle, évoquer les scènes les plus glorieuses de l’histoire de la Flandre. Ses goûts le portaient à exalter les triomphes du peuple flamand. Dans toutes ses compositions, comme le dit M. Verhelst, il montre les hommes bons et gé-néreux, malgré leur force ; les femmes, gra-cieuses sans mièvrerie. Et ces foules tumultueuses, on les voit se former en cortèges rutilants, au milieu des bannières et des oriflammes qui pal-pitent dans le ciel bleu. On croit entendre les clameurs de la foule, qui se mêlent aux sons graves des gros bour-dons, sur lesquels bro-dent, légères, les notes plus grêles des carillons. Parmi cette suite impres-sionnante de vastes com-positions exécutées à Bruges, qui seules suf-firaient à illustrer la vie d’un artiste, notons sur-tout cette admirable chevauchée du Retour des Fla-mands après la bataille de Groeningbe, où, au milieu des th goedendags a brandis par les métiers en délire, galopent en un flamboiement d’or des che-valiers thiois sur leurs lourds chevaux de Flandre richement caparaçonnés. Et à côté de ces guer-riers robustes, conduits par le comte de Namur, ce personnage de légende, chevauche un bel ado-lescent en tunique blanchie, le front couronné de roses, et sur un palefroi princier, ramassé sur le champ de bataille, un moine soldat serre l’épée libératrice, tandis que son regard extatique cherche le ciel… Cousine le disait en I900 M.Verlant, à l’occasion de l’éloge funèbre d’Albrecht Devriendt,