L’ART ET LES ARTISTES vention. Mais en somme roll travail d’un véritable artiste, en présence de la nature, n’est-il pas en réalité le produit de la vision personnelle, de l’état d’aine?… Et le travail en plein air, ou dans l’atelier, n’est-il pas toujours, lorsqu’il crée une oeuvre d’art, le résultat de la vision antérieure et réfléchie, de tout un passé d’études et d’observations continues, devant la nature qui a servi de tra-me et de guide, mais qui n’est jamais » ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre ?… » Et le mot de Corot, peignant aux environs de Paris des nym-phes dans une de ses aubes or. gentilles, o voilà ce que j’ai vu », n’est-il pas tout à fait délicieux ?… Ne suffit-il pas qu’un tableau donne l’impres-sion de la réalité et doit-on s’oc-cuper du com-ment et du pour-quoi qui ont amené le peintre à exprimer sa vi-sion, visuelle ou spirituelle, sur la toile ? Une photo-graphie, même la plus respec-tueuse des <, va-leurs », égalera-t-elle jamais en vérité un simple croquis d'artiste? Pour donner un exemple, quel peintre, fut-il Claude Lorrain,Turner ou Millet, a jamais pu faire sur nature un de ces effets de soleil couchant, d'orage ou de tempête, fugitif et variable, sans interruption ?... Mais il suffit ! Le résultat, en art, est tout. C'est pourquoi les plus fins connaisseurs, les esprits les plus délicats et les plus sensitifs ont-ils toujours hautement prisé les toiles et les dessins de MatthYs Maris, et ses oeuvres, trop peu répandues pour être tombées dans le domaine du snobisme, sont, de son vivant, payées à prix d'Or, et disputées par les amateurs savants et raffinés de l'Angleterre et de la Hollande. La vogue joue sans doute Un rôle dans ces en-chères excessives, qui exaspèrent l'artiste, mais c'est un fait que tous les esprits supérieurs pla-cent Matth•s à un rang très haut, très spé-cial, et compa-rent ses oeuvres seulement à celles des plus fins poètes et des meilleurs pein-tres. Depuis long-temps il a aban-donné sa pre-mière manière, claire et limpide, et cousine je l'ai dit, d'une préci-sion de Primitif. Peu à peu sa vision s'est ex-primée plus dis-crètement, pres-que 'mystérieu-sement, comme si une crainte d'être compris par le public hantait l'artiste. Ses figures sont devenues des apparitions de rêve, très des-sillées et vivan-tes, mais légère-ment voilées. CertainsCarrière peuvent en donner une idée, niais là où le grand peintre français atténue avec la brosse et le chif-fon, Matthys Maris travaille et retravaille sa pâte, comme Mallarmé ses vers, ajoutant et surajou-tant pendant de longs mois, afin de donner à son oeuvre la perfection qu'il cherche et l'imprécis qu'il veut. Si jamais peintre n'a peint o que la nuance », LA PETITE FIANCÈE (D'APRÈS UNE EAU-SOI n (DERNIÈRE PÈRIODE) Ur: DU P., c. 270