L’ART ET LES ARTISTES Evidemment ce n’est pas du u Louis XV n. Mais ainsi se développe la puissance créatrice qui caractérise son art. Céramiste ignorant du métier céra-mique, décorateur méconnu des pra-ticiens, il est lui-même cela compte. Les autres sont de ce troupeau qui commence toujours à grogner quand on le dérange et puis qui suit. Ce sera simple, ici, de suivre, et facile. Et quel heureux prétexte! On découvrira, on retrouvera la tradition. On s’apercevra qu’en art décoratif, s’il y eut des époques fécondes, ce furent celles où l’on travailla ‘h comme Méthey le fait aujour-d’hui. Et le vitrail, le fer forgé, le cuivre, l’étain en pourront être rénovés. Le jeune Jean Méthey, qui a sept ans, exécute déjà de grands dessins d’imagination. Un jour, son père lui installera un métier à tisser, lui don-nera des laines de toutes les couleurs et lui dira : a Main-tenant, fais quelque chose à toi. n Quelque chose à toi… N’est-cc pas admirable cette confiance dans la vertu de l’effort personnel, ce dé-dain des méthodes enseignées, cette conviction, qu’à une époque où tout est à inven-ter, ceux qui cherchent seuls sont les seuls grands? Sans préambule donc, sans préparation, sans la moindre mise au point esthétique, voici une assiette, un vase, une coupe d’André Méthey, et je dis à vos yeux, non à votre mémoire, ni à votre bon goût, Si vos yeux, à vos yeux larges ouverts, simplement regardez. Peut-être ne verrez-vous pas tout de suite. Vous pen-serez : o Oui. C’est curieux. Vous n’objecterez rien si, autour de vous, l’on s’est enthousiasmé. Il faut compter avec le snobisme. Puis vous acquiescerez : t, C’est ceci, cela que je préfère. h, Quand Méthey montre ses céra-miques et que, de son regard avide, il saisit l’éclair sympathique, l’émotion conquise t. Hein, dit-il, ça chante! n Ça chante… On reçoit sur la rétine du bleu, du jaune, du rouge, de l’or, du gris, du brun. Ça chante… Les tons jouent, les lignes s’entremêlent, les formes simples et pleines dressent leur harmonie. Ça chante… Qu’est-ce donc que cette musique nouvelle offerte à nos yeux étonnés ? Une belle couleur, bien franchie, un défi aux tons éteints des tentures usées ou des peintures mourantes dans l’or pâli des cadres, une cou-leur jeune et fraiche, loyale et saine, rouge comme la pulpe saignante d’une cerise, bleue comme le bleu du ciel, une couleur qui vaut par elle-même, qui s2 montre toute nue au grand jour, qui crie à pleine lumière, c’est gai, c’est de la joie solide, comme un beau son. — Fi! direz-vous… Quelle esthétique!… Est-ce cela un art ? Ce régal des veux d’où l’esprit est exclu ?… Mais j’en veux sur le champ avertir ma servante qui se pâme aux couleurs voyantes. Vous vous méprenez. Vous confondez le son avec le bruit. Je vous parlais d’une couleur unique et vous évo-quez les cacophonies. Le jeu n’est pas aussi simple. Ou plutôt il l’est d’une autre manière. Accepter comme telle la saveur des tonalités brutes, c’est un eflbrt pour des yeux trop instruits. Mais faites cet effort. Consentez à ne plus croire aux couleurs distin-guées. Oubliez un instant la douceur des pastels, le channe Phül . ru, 263