L’ART ET LES ARTISTES John Russell est le créateur du pastel anglais. C’est avec lui que l’art continental du pastel se naturalise véritablement dans les Iles et s’adapte au tempérament plus chaste, en tous cas, plus idéa-liste de la race. John Russell, le «prince des pas-tellistes», va faire école. D’une composition simple et élégante, d’un coloris osé mais pur, il sait faire contraster et se marier les bleus foncés des ciels et les blancs lumineux des mousselines. Ses ladies ont des yeux expressifs et sont d’une santé éclatante : leur épiderme ne connaît pas le fard des jolis modèles de Van Loo et de Nat-tier. Ses enfants sont adorables potelés, vifs et joyeux, ils sont souvent accom-pagnés de leurs animaux favoris, lapins, chiens, chats, pigeons, que le peintre a traités avec l’at-tention affec-tueuse d’un vé-ritable Anglais pour nos frères inférieurs. Les modèles de Rus-sell ont leur in-dividualité pro-pre, ils respirent, ils vivent d’une véritable vie, dans un décor délicat et vapo-reux. Le succès de Russell fut im-mense et déter-mina de nom-breuses vocations : l’exquis miniaturiste et des-sinateur Cosway et sa femme Maria, si fêtés du prince de Galles et de la Cour, sont aussi des pastellistes : ils traitent le pastel comme des artistes parfaits et personnels peuvent le faire, niais dans des tons plus flous, avec des contours moins accen-tués et avec moins de force que le maître. Dowman, le dessinateur précis, l’auteur de fins lavis délicatement colorés, ans profils purs et distin-gués, suit leur exemple et connaît la même vogue. Ozias Humphrey, s’essaie dans ce genre rnoins pénible pour ses yeux malades et nous laisse des chefs-d’ocuvre; il obtient les plus heureux effets en juxtaposant les couleurs sans les marier ou les adoucir avec le doigt, comme le faisait Russell. Hugli Douglas Hamilton, l’artiste irlandais, est un pastelliste plaisant et léger, aux tons gris vaporeux ; il sait donner à ses sujets beaucoup d’expression et de vérité. PM. Reck,. WILLIAM PEURS 257 M » H A DDEN—BROWN William Ha-milton, peintre d’histoire et de portraits, appli-que le pastel de façon large et facile, en s’inspi-rant de la trans-parence de Rom-ney,cequidonne naissance à la tradition dou-teuse d’un Rom-ney pastelliste. L’erreur est con-cevable : Pierre Romney, le pro-pre Aère du maître et qui s’inspire égale-ment de lui, laisse dans les environs d’Ips-wich des pastels importants. Un habile amateur, le Ré-vérend William Peters, esprit libre et fron-deur, qui eût été un parfait abbé de la cour de Louis XV, peint d’une manière molle, élégante et langoureuse. C’est le seul pas-telliste anglais dont l’oeuvre soit vraiment sen-suelle à la façon des pastellistes français; l’on sent qu’il s’amuse à peindre ses belles amies, aimables et aimées. Les graveurs illustres, les Bartolozzi, les Ci-priani, les J. R. Smith, délaissant le burin, sont tentés par notre art et produisent là encore des chefs-d’œuvre. Daniel Gardner est le plus grand de ces pastel-