L’ART ET LES ARTISTES ÉTATS=IJNIS T ‘INSTALLATION définitive au Metropolitan Museum de New-York, de ses collections d’art égyptien a permis au public de se rendre compte non seulement de ce qui, auparavant, était exposé d’une façon moins satisfaisante, mais encore des acquisitions nouvellement reçues de la Vallée des Rois prés de Thèbes et des autres endroits où le musée fait des fouilles. Cette oeuvre, sous la direction de M. Théodore-M. Davis, a produit d’admirables résul-tats. L’exposition que le musée a faite de ses armures et de celles que prêtèrent pour l’occasion des amateurs impor-tants offrait beaucoup d’intérêt. L’effet de la grande salle où le conservateur Dr. Bashford Dean avait groupé toute un chevauchée, avec des soldat, porte-étendards, etc., était très imposant ; l’ensemble de l’exposition a laissé une vive impression de ce qu’était l’art de l’acier au Moyen àge. A présent nous avons une exposition d’estampes japonaises, dont un grand nombre de Moronobou, de Masanobou, Kiyonobou, Kiyonaga, etc. Deux tableaux italiens, reçus l’année dernitre, aideront sensiblement à nous donner une représentation de leurs grandes écoles, que nous sommes encore loin de pouvoir étudier chez nous comme elles le méritent. Ce sont le Botticelli et le Carpaccio provenant de la collection Abdy de Londres. M. J. Pierpont Morgan, le président du musée, les a accompagnés du prêt de quatre tableaux italiens de sa collection privée ce sont un Fra Angelico, un Pérugin, un Bartolmné Vivarini et un Macrin° d’Albo. Mais il ya une nouvelle bien plus importante relative aux collections de M. Morgan. C’est qu’il s’est décidé de transporter en Amérique tout ce qu’il avait de tableaux, de sculptures, de faïences, de bijoux, etc. dans sa maison de Londres et dans les musées d’Angleterre. Cet événement, d’une signification presque historique pour nous. a été considéré par les journaux anglais comme une perte nationale. La valeur de ces objets monte à 75.000.000de francs. Le Metropolitan Museum a déjà reçu les premiers envois. Notre excellent musée de Boston — le musée le mieux dirigé des deux hémisphères au dire de Sir Claude Phillips — s’est enrichi d’un triptyque par le Maitre de Saint-Séverin, vendu go.coo frayes de la collection Weber de Hambourg. Au dernier moment nous apprenons que les deux Velasquez de la collection de la duchesse de Villaher-mosa ont été transportés à New-York pour une de nos galeries privées. Ce sont des portraits du roi Philippe IV et du duc d’Olivares. Pour compléter notre liste des vieux maitres que l’Amérique verra pour la première fois cette saison, il convient de mentionner le grand Rubens Le Couronnement de sainte Catherine datant de 1633, que MM. E. Gimpel et Wildenstein exposent à ce moment. Il vient du chàteau du duc de Rutland. Ceux qui s’intéressent à la peinture moderne — et c’est lit un sujet sur lequel on a besoin de s’instruire en Amérique, comme ailleurs — apprendront avec joie que ITA L’ITALIE traverse-t-elle cette période de longue prcparatum L dans le domaine économique, que Montesquieu, cité par Taine, met à la veille de toute renaissance mentale et spirituelle des peuples ? La péninsule qui s’acharne depuis de longs mois dans une guerre lointaine, qui « vit une heure de flammes, peut-elle donner en même temps de grandes floraisons à l’art? 90 M. John G. Johnson de Philadelphie a reconnu l’impor-tance de l’art français contemporain, et acommencé à prouver cette opinion par des achats. Les historiens d’art ancien ont dô étudier la collection de M. Johnson depuis longtemps pour ce qu’elle contient des Primitifs, de Rembrandt, de Vermeer et bien d’autres. Nous y verrons maintenant des Cézanne, des Gauguin, des Van Gogh. Pour les choisir, M. Johnson s’est très sagement assuré le concours de M. Williain 1. Glackens, un des meilleurs peintres américains de cette époque, et un grand enthou-siaste des français modernes. Nous avions depuis longtemps, on le sait, des expositions comme celles de New-York, de Pittsburgh, de Philadelphie. Mais leurs jurys se sont toujours montrés plus accueillants pour les artistes déjà connus que pour les nouveaux talents. Dans un pays où le développement est de toute première nécessité c’était là une condition défavorable. Je cite donc beaucoup plus volontiers les expositions du Mac Dowell Club de New-York, et la formation de la Société des peintres et sculpteurs américains que les grands salons plus ou moins routiniers. Le Mac Dowell Club, association d’hommes de lettres, d’artistes et de musiciens a offert aux artistes américains une grande salle admirablement éclairée où l’on peut expo-ser par groupes. L’espace permet à chaque artiste de montrer un nombre considérable de ses œuvres. Les groupes se sont composés par le libre choix de leurs membres ; les expositions ne comportent pas de frais (sauf pour imprimer le catalogue, etc.) et durent deux semaines chacune. Les amateurs leur ont fourni un accueil qui marquait avec quelle faveur ils voient cette tendance de porter au jour l’intégrité de notre production actuelle. La Société des Peintres et Sculpteurs Américains propose une exposition annuelle sans jury comme celles du Mac Dowell Club, tiens quimontrera d’un seul coup l’état de notre art. M. Arthur B. Davies, peintre de grande distinction et de grandes qualités, est le président. Il nous annonce que la première exposition de la société aura lieu en février em3. Une somme de a5.000 francs a été souscrite, ce qui assure de la place pour six ou sept cents œuvres. Des musées et des sociétés artistiques de tout le pays ont déjà fait appli-cation pour l’envoi des œuvres afin de continuer l’exposi-tion chez eux. Une belle collection de peintures de Renoir a attiré à lu galerie Durand-Ruel les meilleurs de nos amateurs. M. Maurice Sterne, qui a travaillé à Paris en s’inspirant des maitres contemporains comme plus tard des Primitifs italiens, a eu un grand succès en montrant à une galerie de New-York un choix de ses dessins. Ceux qui aiment le tableau La Neige de M. Robert Henri au musée du Luxembourg, apprendront avec plaisir que l’Académie de Pensylvanie vient d’acquérir pour sa collection permanente une œuvre de ce peintre. \ il I le PACII. LIE i.111uLIS eus, on a déjà pu remarquer comment, et l’on a déjà pu signaler pourquoi, les fétes du Cinquantenaire italien ont été bien plus dignement couronnées par l’envoi d’une armée de conquête il Tripoli, que par l’exposition romaine des Beaux-Arts. L’action est contraire au réve, et toute éclosion artistique est une affirmation de la vie contemplative plutôt que de la vie agissante d’un peuple.