L’ART ET LES ARTISTES ATELIER DE L’ARTISTE A et n’ayant gardé que quelques traditions, quelques formules de ciselure et de ferronnerie ? Quoiqu’il en soit, ces peuplades si arriérées au point de vue intellectuel qu’il n’existe chez elles pas le plus petit vestige d’histoire, au point de vue moral qu’elles considèrent le cannibalisme comme une des formes les plus normales de l’activité humaine, ont le sens esthétique infiniment développé, et surtout d’une étonnante sùreté. Peu d’instruments de ménage, tarie de famille étant réduite à presque rien, mais ils sont d’une adaptation parfaite. Des idoles, représentations sommaires et parfois singulièrement synthé-tiques du corps de l’homme et de la femme. Certaines, avec leurs barbes pharao-:niques, font penser à u ne possi ble pénétration égyptienne, jadis. D’autres évoquent je ne PARIS (17.-DE .CHAUSSÉE) sais quel gothique barbare. Quelles pensées, quels rêves s’agitèrent dans les cerveaux de ces sculpteurs de dieux ? En voici un justement, que M. Ward a coulé dans le bronze. Il est assis, farouche. Impénétrable et attentif, il couve des yeux le morceau qu’il dégrossit, avec des airs de main-tenir sur ses genoux quelque enfant révolté pour lui faire subir une opération cruelle… Il est si vivant, cet homme de bronze, que l’on ne sait plus très bien où l’on se trouve. Certes, ce n’est plus à Paris, mais dans les sous-bois d’une forêt congolaise, où règne ce demi-jour vert, éternel… Tout s’anime : le python minéralisé, pareil lui aussi à un serpent de métal, à moins qu’il n’aille se dresser, dans sa puissance… le peuple d’hommes et de femmes que M. Ward a récréé comme pour lui faire L’ARTISTE DANS SON ATELIER (1912) 74