LE MOUVEMENT ARTISTIO3 I . L’ETRANGER HOLLANDE Ltemps passe avec une rapidité terrifiante, les expo-sitions se suivent et les événements se succèdent avec l’incohérence de la fatalité. Tout récemment je parlais de Willem Maris; aujourd’hui, je dois annoncer la mort de Piger Dupont, le très remarquable gravair hollandais qui, jeune encore, vient de disparaître, â Amsterdam, en pleine force, en plein talent. Mais avant d’analyser l’art de cet artiste si rare et d’un insérés si universel, je dois léser, avec la Hollande artiste tout entière, le peintre-aquafortiste Ch. Storm van s’Gravesande, qui, en janvier, a atteint l’âge de 7o ans, Afin d’éviter toute manifestation, Storm avait quitté le pays pour quelque temps. Néanmoins son anniver-saire, — précédant de quelques jours le 87′ de Josef Israiils et de quelques semaines le 8o, de Mesdag, qui fut brillamment célébré si La Have, — ne passa pas inaperçu. Et à bon droit, car Storm est une des personnalités remar-quables de notre école actuelle. Il a été un des pionniers, un desavant-coureurs du vaste mouvement contemporain de l’eau-forte. Car il faut noter qu’à l’époque oit débutait Storm de s’Gravesande, cet art n’était nullement apprécié par le public. Un petit nombre d’artistes et non des moin-dres! tels que Méryon, Ch. Jacque, Seymour-Haden, Corot, avaient exécuté des merveilles aujourd’hui hors prix en bonnes épreuves, mais ces œuvres étaient alors de si peu de valeur que Méryon ne trouvait pas l’argent nécessaire pour se faire imprimer et qu’un cuivre de Corot se vendait pour quelques dizaines de francs! Storm qui était un ami du génial Rops, fut « pris par l’eau-forte, comme tous ceux qui sont prédestinés â pratiquer cet art spontané et passion-nant, léger ou profond, permettant confine nul autre, gréer â son immatérialité, d’exprimer les plus délicates nuances de sentiment aussi bien que la grandeur tragique au moyen d’effets puissants, variés et dramatiques. Ch. Storm de s’Gravesande termina sus études de Droit avant de se mettre â la peinture. C’est à Bruxelles qu’il alla travailler sous la direction de W. Roelofs, le paysagiste hollandais qui fut le premier artiste de son pays â ressentir les influences du mouvement « moderne qui succédait en France au Romantisme. Est-ce Roelofs qui montra se voie â Storm? Sans doute l’influence de Rops fut grande aussi, car l’aquafortiste enthousiaste et charmeur, eu disant un jour à notre pointe-séchiste qu’il devait parvenir â exprimer un effet de brouillard en quelques traits succincts et synthé-tiques..,.!filit ainsi très spirituellement le genre de travail dans lequel Storm devint un maitre. Car si cet artiste fit parfois des planches très travaillées, telles que sou Phare de lealeck, son genre personnel, sots moyen d’expression individuel consiste en an travail émi-nement sobre, en peu de traits, accentués ou subtils, qui suggémrant le mouvement, l’atmosphère, la profondeur, —la vie mémo du paysage. Storm a été le peintre des lourdes eaux presque mortes des fleuves de la Hollande et de la Zélande. Avec un rare talent il a rendu les flots, la houle, les rides de ces bras de mer smnolents et mornes, agités seulement par la caresse souvenot traitresse des vents du large. Ces espaces étendus sont parfois é peine rompus par la tache pale d’une minus-cule voile ou par un alerte remorqueur, point noir mettant une note animée dans ces espaces infinis. D’autres fois aussi il a rendu avec puissance et sentiment le choc brutal et rongeur des vagues soulevées par la tempête et venant s’abattre, encore violentes mais épuisées, contre les digues et les brises-lames noirs. Ou bien, quittant sa patrie, c’est le calme lumineux de la Lagune de Venise, l’étendue vapo-reuse se confondant avec les ciels nacrés et perlés, avec, ça et là, la tache élancée d’un campanile ou quelques « bar-gozzi a de Chioggia qui semblent flotter entre le nid et l’eau plate. Les débuts mémos de Storm furent des succès. Dès 187o il était célébre et cité parmi les premiers aquafortistes de son temps. Avec une rare énergie, sans jamais une défail-lance, ce bel artiste continua sa carrière, entreprenant des estampes de dimensions excessives, imprimant le plus pos-sible lui-mémo ses planches, amoncelant les épreuves d’un oeuvre qui compte parmi les plus intéressants de notre époque. Storm n’a jamais, durant sa longue carrière d’aquafortiste, abandonné la peinture, et c’est â cette persévérance que l’on doit, entre autres, les lumineuses, très modernes et char-mantes natures-mortes qui ont, encore récemment, attiré l’attention des peintres aux Salons de la Société des Artistes français, dont il fut nommé membre dès l’origine. Terminons ce bref aperçu en souhaitant au vaillant artiste encore nombre d’années d’un heureux travail et d’une noble fécondité! Px. ZILCEEN. ITALIE Ts. est hors de doute que le public a ratifié, encore une fois, non les prévisions pleines d’espoirs optimistes du monde des artistes, mais celles aux calculs infaillibles du monde des industries. L’Exposition industrielle de Turin, a pris une importance qui semble avoir été en quelque sorte refusée l’Exposition de Rome, et bien plus à celle de Florence. Les industries l’emportent sur les arts. Evidernment cela était â prévoir. L’Exposition romaine des Beaux-Arts n’a pas eu, jusqu’ici tout au moins, le succés escompté. Il s’en faut, et de beau-coup. Le public international, n’a pas répondu de la ma-nière qu’on l’espérait, â l’appel donné aux quatre coins du mondé. La capitale, que les Italiens qualifient couramment d’éternelle, a été un peu délaissée. Pourtant, si l’on peut faire quelques réserves sur le fatras d’ceuvres d’art, fort inégales, et qui se prête à tant d’âpres et justes discussions, assemblées â l’Exposition florentine du Portrait italien, il faut remarquer que, malgré toutes les erreurs de son organisation, l’Exposition de Rome vaut au moins autant qu’un Salon annuel bien réussi. Certains maitres étrangers, appelés â l’honneur d’avoir une salle pour leurs œuvres, ont pleinement triomphé. Certains pays cap-tivent avec une singulière puissance l’attention générale, sans toutefois qu’aucun, parmi eux, s’impose comme une révélation. Les pavillons des différentes nations ont été inaugurés solennellement par les autorités gouvernementales ayant à leur tète le souverain. La présence du mi, si mal desservi 137