L’ART ET LES ARTISTES LES ARTISTES FRANÇAIS Nous ne dirons rien des innombrables histo-riettes mises plus ou moins ingénieusement en couleurs par des artisans habiles n’ayant retenu de l’enseignement officiel qu’un ensemble de recettes permettant de traiter, pour ainsi dire économi-quement, toute espèce de sujet. Ils sont légion aux Artistes Français, et c’est leur encombrement qui fatigue le plus le visiteur. Ils nuisent d’ailleurs beaucoup, par leur voisinage, aux véritables artistes qui exposent à côté d’eux. Car il importe ici de distin-guer de leur foule banale ceux qui, tout en prenant comme sujet une quelconque anecdote de peinture de genre, y savent cependant faire preuve de dons intéressants de science et d’ingéniosité. Pour eux, le sujet est véritablement un prétexte. Et ils ne cherchent pas à spéculer sur son effet sentimental, pour obtenir un trop facile succès. Nous ne nom-merons donc aucun de ceux qui, posant de la cou-leur, souvent gratuite, sur des illustrations sans accent, s’en remettent, pour nous intéresser, sur la légende inscrite au bas du cadre, qu’il s’agisse de quelque tragique épisode du passé, ou d’une théo-rie philosophique, ou de quelque scène familière, telle que des enfants de choeur buvant le vin de la messe et autres fines observations. Une des premières choses que l’on voie en péné-trant aux Artistes Français, c’est une immense décoration de M. Antoine Calbet La Musique, le Drame et la Comédie (le Génie de la Musique révèle à l’Humanité les Harmonies naturelles). Je ne connaissais pas ce talent à M. Calbet. Il a fait là une chose très agréable, pleine de figures légère et volantes dans une atmosphère un peu théâtrale, mais l’ensemble est d’une belle venue. C’est aussi dans une lumière de théâtre que nous apparaît la charmante Gina l’aida, danseuse, que d’un pin-ceau caressant et rose peignit M. Jean-Gabriel Domergue. Du théâtre encore, mais avec quel pathétique étrange et violent, que la scène appelée « El relatorio « (la Veillée du Mort), par M. Lope, Mezquita. Nous l’avons reproduite à l’occasion d’une lettre ois nous en entretenait M. Causse, dans sa correspondance d’Espagne. Le talent de M. Bas,- non Copeland, dans deux exquises toiles Le Tré-sor et Les Babillardes, m’a paru s’apparenter à celui de M. Frieseke et de M. 13unnv. Même délicatesse de tons, même distinction dans l’originalité. Même observation pour M. M.-E. Kindon (Le second Volume), intimiste de race. Quant à M. Richard Miller (La Toilette), il semble avoir atteint la pleine maîtrise de tous ses moyens. C’est un artiste subtil et fort et qui ne se répète pas, tout en suivant avec la lenteur de la vraie logique le chemin de son développement. On a fait un grand succès — selon moi très mérité—aux portraits de femme de M. Dufau. On ne peut imaginer, en effet, plus complètes effigies rien, ni la grâce des attitudes, ni le charme de la couleur, ni l’ingénio-sité des accessoires, ni la tendresse du coloris n’en fait oublier la pénétration psychologique, si intense. Parmi les artistes admirés les précédentes années, nous avons retrouvé avec plaisir et en voie de pro-grès M. Michel Tkatchenko, paysagiste d’une sug-gestion infiniment mélancolique avec En Ukraine et La Maison Rouge à M’aber). (Petite Russie); M. Gennaro Befani qui, sans oublier sa Bretagne inspiratrice, manifeste dans une toile hollandaise ses qualités de coloriste si rare (Les Mariés et 10111′ de File); M. Victor Guillonnet, toujours épris de la lumière (Le Foulage du Blé et Un Soir en Pro-vence); M. Jean-Pierre Laurens (un très beau Por-trait de M. Jean-Paul Laurens es de son petit-fils Claude); M. Max Bohai, portraitiste massif et sérieux (Mire et Enfants); M. Louis-François Biloul, un des plus suaves peintres de nu dont s’enorgueillisse ce Salon (Après le Bain) et qui est plus fort encore qu’autrefois; M. Léon Félix, jeune homme du plus grand avenir qui, datas Le Miroir d’Eau et dans Fille d’Eve, laisse sa délicate sensibi-lité chanter le doux poème estival des feuillages et des gazons, des eaux, de la lainière et de la chair féminine tenant l’accord ; M. Henri Dabadie (La Ruine, Environs d’Alger, L’Hiver); M. Jean Roque, dont le tableau Barques et Pécheurs est peint avec largeur et solidité et frappe par la massivité puis-sante de sa structure. Signalons tout particulièrement quelques (navres marquantes L’Enclos, mais surtout L’Enfant aux Fruits, de M. Jean-Nlarcel Cosson, si spirituel-lement, si joliment agencé et peint; le Nu, de M. William Cook ; l’opposition de deux paysages d’hiver et d’été La Grande-Rue, les A 1110111flIA » et La Grande-Rue, la Neige est gaie, de M. Émile Boggio ; Barry, effigie d’enfant méditatif dans des 124