L’ART ET LES ARTISTES On dirait que M. John Lavery, déjà si parfait portraitiste, s’est surpassé lui-méme avec l’effigie délicieuse qu’il nous montre cette année Ma Femme. On ne peut rien imaginer de plus char-mant, ni non plus rien de plus ingénieux que la façon dont M. Beatrice How présente ses ado-rables têtes de bébés, sinon la façon savoureuse et rare dont elle les peint. Avec son important envoi de cette année (6 portraits d’hommes et de femmes à l’envi excellents), M. Olga de Boznanska atteint enfin à la grande célébrité à laquelle elle avait droit. Sa manière, à la fois raffinée et secrète, est de nature à enchanter aussi bien les psychologues que les amateurs de simple technique. C’est une grande artiste. Quant à M. Boldini, il s’exaspère jusqu’au déséquilibre, et il traite même une nature morte avec la même cinglante rapidité que celle qu’il inflige à ses mondaines. A côté de cet art crispé et glacial, le calme et la pondération, la science de M. Armand Point rassurent. Ce peintre connaît à fond son métier, un des plus difficiles et des plus abstraits qui soient, malgré les apparences et, au lieu de s’occuper à nous étonner, ne songe qu’à l’approfondir. Admirons, trop rapide-ment hélas! Paderewski, de M. Charles Giron, lacéré par un fanatique; les portraits de MM. Louis Picard, si subtils et si délicats; Hubert de La Roche-foucauld, d’une précieuse netteté de contours; William-Albert Ablett, Hawkins, Valdo.-Louis Barbey, Harold Speed, Glehn, Zak, etc. Je voudrais pouvoir m’étendre davantage sur le talent d’un jeune peintre dont j’ignorais le nom, M. Alberto Lopez-Buchardo, qui expose un Por-trait décoratif où se retrouvent quelques-unes des qualités si expressives qui ont fait la juste réputa-tion de M. Hermen Anglada, et aussi de M. Johan-nès Edouard Hohlenbirg, qui nous donne un très curieux et bizarre Portrait du Philosophe. J’ai moins aimé, cette année que d’habitude, les envois de M. Michel Simonidy et de M. Jacques Brissaud, encore que pleins de talent. On retrouve avec plai-sir, et qui semblent n’avoir subi aucune altération, les qualités qui recommandent à l’attention les noms de MM. La Gandara, si mondain ; Dagnan, Koffinann (un excellent portrait de M »ii Henriette Roggers); de M.la princesse Murat, de M. Ethel Mars, etc., etc. M. Zacharian, très savant, cuisine des natures mortes, qui font délicatement penser à Chardin et à Ribot. Et nous remarquerons avec sympathie les fleurs que peint, dans la pénombre, M. Delvolvé-Carrière et, dans toute la lumière, M. Jean Denesse et Galtier-Boissière. Ne quittons pas la peinture sans citer les noms de MM. Emile-Bastien Lepage, Pierre Bracque-mond, André Dauchez, Gaston Guignard, Francis Jourdain, Emmanuel de La l’illéon, Gaston Lecreux, Albert Lechat, A.-M. Le Petit, Lévy-Dhurnier (une très belle décoration pour mi hôtel : Nuées du Matin); Lhermitte, Mesdag, Henri de Nolhac, Pripet, René Seyssaud (La Rivière en Automne); Arpad Vida, Zezzos, etc., etc.; de Mini’ Marie Boylesve, Breslau, Marie Cazin, Gardiner, Enna Hoppe, etc. A la section des dessins, aquarelles, pastels, miniatures et cartons, nous retiendrons spéciale-ment les Etudes de Chats, de M. Carayon, les jar-dins de M. François de Marliave, les nus de M. Monod, les spirituelles charges de M. Feldmann, un excellent portrait de M. de La Rochefoucauld, une nouvelle série de M. Chahine, de prestes études de mouvements de M. Aronson, un ner-veux portrait de M. Spinelly, par M. Carrère, et surtout de grands panneaux à l’aquarelle, par M. Lucien Simon. Joignons-y les envois de MM. Prunier, Souillait, Marcel Roll, Biéler, Pierre Carrier-Belleuse, Chabanian, Friant, Gui-guet, Hochard, lsvill, A.-M. Le Petit (si amusant), Luigini, Henri Paillard, Armand Point, Zak, etc.; de Curot-Barberel, Elisabeth Nourse, Bea-trice How, Osterlind, etc. Admiré à la gravure l’envoi tout entier de M. Paul-Enfile Colin, un des plus purs maîtres du bois que nous possédions aujourd’hui. La perfec-tion de sa technique est égale à la noblesse de son inspiration. Aussi les oeuvres de l’âpre Louis Legrand, du subtil et populaire Chahine, de M. Dauchez, de feu Marcel Bertrand, de M. Pierre Guzman (de très intelligentes illustrations pour un Chateaubriand), de M. Maurice Achener (Quatre Eaux-Fortes d’Italie). M. F.-L. Schmied expose un Cluilaignier (bois original) du plus magnifique effet décoratif; M. Hopkins japonise avec grâce; M. Pierre Roche manie la gypsographie avec une sorte de génie. Je n’omets point les réalisations excellentes de MM. Paul Jouve, Hochard, F.-T. Simon, Henri Meunier, A.-M. Le Petit, Gaston Lecreux, Valére Bernard (une eau-forte en cou-leurs : Le Port de Marseille); les deux Beltrami, Jacques et Marcel, Claudius Denis, Hallo, Jean-niot, G. de Latenay, Auguste Lepère, graveur incomparable, Malo-Renault toujours en progrès, Walther, etc. On ne saurait vraiment rien ajouter à ce qu’on a défia dit de M. Auguste Rodin. Son admirable buste du Dur de Rohan, son Nu en fleurs qui jaillit 122