L’ART ET LES ARTISTES Pho JEUNES PAVE SNES BAVAROISES turc. Jeune et ardent, il voyage, s’instruit, interroge passionnément Velasquez au Prado, Rembrandt au Rikist-Museum. Il passe cinq années à Naples, sa voie n’est pas encore trouvée, il s’essaie dans la peinture religieuse, ce qui ne lui convenait pas, car je ne sais guère de tempérament moins mys-tique que le sien; il s’astreint au tableautin de genre, ce qui fait sourire quand on songe à sa pré-sente manière, large et libre. C’est vers 1895 que ses yeux se dessillent. Les joyeuses fanfares impressionnistes le frappent. Il comprend. Les voiles se déchirent. Il s’échappe de la cave emplie de bitumes. Quelle révélation pour un homme sincère et qu’on a abusé en lui ensei-gnant les recettes vides de l’académisme, que ces toiles éclatantes de nos Motet, de nos Sisley et de nos Pissarro! Mais, et dés cette époque des essais modernistes, Borchardt affirme un équilibre sain : ce n’est pas en effet — à l’instar de tant d’autres néophytes éblouis du sous-Sisley Ou du pseudo-Monet que ce robuste Allemand, bien doué, va rééditer. Il ne cherche à plagier ni les finesses irisées, ni le faire moelleux de Renoir, les délicatesses blondes de Sisley, le lyrisme de Claude Monet, peintre du soleil. Et, surtout, il ne va pas s’appliquer à édulcorer laborieusement un talent so-lidement germanique en l’amenuisant à la française. Les effets que Pissarro tire d’un verger ou d’un pacage normand ne sont pas ceux que commandent le sol, le ciel, les collines, l’atmosphère de Ba-vière. Borchardt sera logiquement un élève, puis un émule alle-mand de l’impression-nisme français. Il saura transposer et demeurer franchement de sa race, avec les caractéris-tiques de cette race. Vers le mémo temps, l’analyse pointilliste le requiert. Il décompose systématiquement. Mais, peu à peu, il montera vers plus de lumière. Il comprendra bien-tôt que le métier néo-impressionniste doit être considéré comme une préparation, comme un à dessous » et que, ce qui est pour les pointillistes un aboutissement, doit être pour lui un point de départ. L’éclat sonore, la richesse profonde et veloutée de sa pâte, seront obtenus par ces esquisses é divisées » auxquelles s’arrêtent les impuissants. De cette période datent le Dimanche en Bavière et le beau portrait d’Hans von Œl,blaeger que le Luxembourg s’empressa d’hospitaliser. L’auteur était d’ailleurs digue de ce rare honneur, car l’effi-gie est forte, rude et vivante, le ciel puissamment traité — à la Borchardt. Le Dimanche en &mien’, que j’ai revu récem-ment chez l’artiste (et je m’étonne qu’un musée d’Europe ne l’ait pas encore acquis) est un exemple de ce que deviennent avec le temps les oeuvres honnêtement construites. Vous vous rappelez le mot connu é Je ne peins pas pour aujourd’hui. Qu’on attende dix ans! e Cette belle toile justifie un semblable propos. Tout ce qui, à son appari-tion, eût pu paraître dur et aigre, s’est apaisé, fondu, harmonisé : les bleus violacés d’une jupe, les blancs d’un fichu et du tablier, le marron de la culotte courte, le vert-clair du gilet du gars bava-rois, les verts de la prairie drue, le rose des nuages légers et modeles, tout a pris une étonnante et lisse qualité d’émail, un ton chaud, ambré, doré,