LA PEINTURE ITALIENNE trouva habilement le moyen d’inter-rompre cette œuvre de glorification de Jules II. Il le chargea, en 1516, d’aller faire à Florence une façade pour San Lorenzo, l’église des Médicis. Séduit, rêvant d’édifier une montagne de sculp-ture, l’artiste partit depuis ses trois ans de réclusion dans la Sixtine, son imagination ne s’adaptait plus qu’à des entreprises gigantesques. Celle-ci d’ail-leurs échoua, plus encore que le tom-beau de Jules II. Prétextant le manque d’argent, dès 1520 Léon X rompait le contrat et occupait Michel-Ange loin de Rome, en lui confiant des travaux d’architecture et les tombeaux des Médicis. Il était libre de faire réaliser ses désirs d’humaniste par uns jeune homme dont le riant génie lui conve-nait infiniment mieux.’ Né à Urbin en 1483, fils de peintre, camarade de Timoteo Viti, élève de Pérugin dès 1499, peignant à Pérouse, à l’dge de vingt ans, uni Coneomnrurenl de la Vierge, puis en t i°4 l’adorable Sposalr-jo du Brera, travaillant à Cira di Castello, aidant Pinturicchio à établir ses cartons de la Libreria de Sienne, copiant Signorelli, Poila-juolo, Léonard, voyageant, se préparant lentement et avec ordre, Raltaello Santi, dit Sanzio, vint, après cette période ombrienne, à Florence en 1504, pour établir sa réputations, fortifier sons dessin, étudier Masaccio, travailler avec Fra Bartolomeo, s’inspirer de Donatello et de Léonard, et inféoder ses préoc-cupations de chaleureux coloriste d’Ombrie aux recherches de perfection linéaire où triomphaient les Florentins. De cette époque datent les Madones si célèbres, si pures, si exquises dans leur coloris froid et clair, la Madone au Chardonneret (Uffizi), la Belle Jardinière (Louvre), la Vierge du Grand Dite (Palais Pitti), celles de Munich, Chantilly, Berlin, Vienne, la Vierge au Baldaquin (Pitti), la Sainte Famille à l’Agneau (Madrid), la Sainte Catherine d’Alexandrie (National Gallery), influencées par Léonard mais imprégnées de ce charme indéfinis-sable qui restera l’énigmatique et attrayant secret de Raphaël et qui mêle à la douceur ombrienne un élément psychique inconnu. De la même époque datent les portraits d’Angelo et Maddalena Doni (palais Pitti), de l’artiste lui-même et d’une femme inconnue (Uffizi), et entre temps Raphaël va à Urbin et à Pérouse peindre le Saisit Georges et .VIII Iii-ANGE CARAVAGE — JOUEUSE ut I.,11 le Saint Mirbel du Louvre, les Trois Greires de Chantilly, la Sainte Conversation de Pérouse, sa pre-mière fresque de San Severo de Pérouse et la Madone Ansidei, et enfin la Mise an Tontlyau, sa première composition pathétique, nettement inspi-rée de Michel-Ange dont il semblait n’avoir jus-qu’alors subi nullement l’influence (Galerie Bor-ghèse à Rome). En 1508, le jeune homme, sur la recommandation de son ami Branlante, était appelé à Route par Jules II. Il avait vingt-cinq ans. Douze années seulement le séparaient de la mort elles allaient être remplies par un labeur incroyable. En même temps que Jules II confiait la Sixtine à Michel-Ange, il comprenait d’emblée la valeur de Raphaël et lui confiait la décoration de son appartement, situé au-dessus de cet appartement Borgia décoré par Pinturicchio, qui lui faisait hor-reur. Là avait habité Nicolas b’ et on respecta le cabinet peint par Fra Angelico ; mais Jules II voulut que ses chambres, ses a Stanze n fussent ornées par des peintres nouveaux. Dès 1507, il avait mis à l’oeuvre Pérugin, Signorelli, Sodoma, Peruzzi, Suardi, Lotto, imais quand il eut jugé Raphaël, il congédia tous ces artistes et lui remit la direction unique de ce travail. La première 151