UNE VISITE A LA MAISON D’ALBERT DCREI2 le fauteuil à dossier de cuir noir ouvre ses larges bras ronds ; vis-à-vis, le portrait du maitre à 28 ans. beau comme un Christ de légende avec la sou-plesse de ses cheveux blonds et longs roulant leurs boucles sur les épaules. Tout près le buffet. pris dans le mur. joyau de menuiserie et de marquete-rie, soutenu de ferronneries fines, très riche, ses 7 petits tiroirs précieusement intailles, se complète du grand coffre à bois et à vin diunent cadenassé. Quelques objets semblent garder encore un reflet de la vie disparue. La porte est surmontée d’une étagère à balustrade présentant. rangés avec soin —la femme de Dürer était méticuleuse autant qu’in-discrète et bavarde—, le grand plat en faïence bleue et jaernedatéde 15o. le pot à lait d’étain. le petit vaseà col bas pour les fleurs, leehandelier àdeux branches, le coffret rare où les lettres dormiront leur sommeil d’oubli. et le sabl ierqui compte les heures et rappelle à tous la fuite der temps Et tout près dans une niche ouverte, la fontaine et le bassin d’étain, la serviette pour l’ablution des mains Détail cette serviette est blanche (grise par le temps, et ses bords ornés d’une jolie banderolle bleue. d’étoiles et de grecques. indique une recherche de luxe. Le. confort large et bien accueillant s’affirme partout. De la chambre de Ddrer il ne reste rien. Le lit est chez un collectionneur ou dans quelque musée sans doute; les sièges dispersés. Mais on peut noter l’emplacement des meubles. Le lit dans le coin. la trace des pieds existe. Les poutres du mur servaient de porte-manteau. Et sur-tout les deux fenêtres à grands carreaux ouvrés de ronds d’étain versaient la lumière à profusion. Peu d’ornements un Christ au fronton de la porte ouvrant ses bras de misé-ricorde: le portrait de la mère de Durer, ce portrait de lutte, de douleur et de foi tetue, chef-dœuvre d’expression. Et c’est tout. La chambre à lit de Dürer toute petite suffisait. aux heures de sommeil. Il ne dut y vouloir aucun luxe, mais la simplicité et la propreté douces au repos. Je me suis arrêté. un moment, la visite termi-née, à l’accoudoir de la fenêtre où le pale soleil d’hiver se jouait parmi la chambre déserte du peintre. Et pour ma joie, j’ai pu imaginer que dans cc jour de janvier. au seuil du nouvel an. Albert Dürer reverrait prendre place au foyer, Rien n’a changé de la vue ancienne, des remparts et de la Peignitz qui chante une douce chanson entre les arches de ses ponts de pierre. Le vieux burg sei-gneurial dresse toujours ses murs crénelés. ::on chemin de ronde où veillaient les arbalétriers. la tour majeure et les ponts-levis devant les portes bardées de fer ou sont inscrites les armes des princes. Et Dürer n’était pas seul, il reverrait, accompagné de ses ami,: de ceux dont il a filé les traits. impérissablement. Sous rues yeux défilaient. en leurs habits somptueux et fanés. Il. 1,1,1,V: sévère comme un Rembrandt: Michael 11″olgemul au profil dantesque ; yeronimus llof,-chu ler à la barbe d’or et aux lèvres de bon vivant : Lord Morley mélancolique et lointain Eobantes lles.eiu.c aux veux braves ; Lucas 1,011 Leyden dédaigneux et élégant Grimepald l’armurier Peler Henlein l’horloger spécieux et malin ; flans Mensche! intrpide sonneur de cor; .1amnitçer l’orfèvre à la barbe de patriarche; Laienno/fsculpteur sur bois; Wur-èelbemer créateur de fontaines; flan; Bohm maitre dessinateur ; Wolf l’architecte I: rail’, sculpteur des murailles; IIirs Vogel maitre verrier Veil Stoss pieux modeleur des ligures saintes flans Kii!mbach. Glocken-clorf et Auberges enlu-mineurs magnifiques Martin Ikhai;” le savant; Ebner. Osiander. Spen-gler. Arecs. tous artistes et artisans, qui concouraient à l’em-bellissement de la cité aimée comme une mère. Ils étaient là, groupés au-tour d’Albert Durer. Mais une telle compagnie m’ef-frayait par tant de trésors en ces Urnes. Et je quittai la maison de Dürer. cepen-dant que venait à mes oreilles un bruit de chopes heurtées et une mélodie de Ilans Sachs, cordon-nier et maitre chanteur de Nurenberg… I 1,1 11 1 111 It J.-F. Loris fi-au.r.fo . NitreMberg,