va se découvrir à lui-même. Il ne s’exilera pas, comme le con-fident deRrnii, jusqu’en Amérique; et, quel-ques années plus tard, cette fantastique patrie de la modernité ne retiendra point ses yeux, car il se déclare un Français très tradi-tionnel qui chérit la lande la plus âpre où fleurit toujours quel-que souvenir, sous les humbles espèces d’une chapelle solitaire ou d’un vieux clocher… C’est donc en Basse-Bretagne, à son pre-mier voyage, qu’il se reconnaît vite et qu’il entrevoit son oeuvre. Et puisqu’il n’est rien de tel qu’unsilence révélateur où la forme des choses traduit nos plus secrètes pensées, le Finistère ne lui ré-vèle pas seulement la sympathie des sont becs figures avec le ciel bas, mais surtout l’accord d’un spectacle avec son désir. Aussi bien, mème veuve de son merveilleux, la vieille Bretagne restera tou-jours mystérieuse; elle n’a pas besoin de ses légendes pour émou-voir, parce qu’elle est non seulement la terre du passé, niais le pays de la nier : avec ses noires passantes, jeunes ou vieilles, disséminées sous un soir nuageux, avec ses antiques plis/ni/ms, au visage hâlé par la bise marine et prématurément ridé par le regret des absents, la Bretagne réelle est le poème vivant de la solitude et le décor de l’attente ; elle avait eu ses poètes; elle attendait son peintre, aussitôt capable d’exprimer aux yeux son deuil éternel, d’en dégager la mélancolie. Paysagiste et figuriste, c’est donc an pays de la Mer qu’un montagnard en voyage a commencé la série qui doit consacrer son nom. L’ART ET LES . RTISTES cirgruscuLE, P111,3 FRAI:LEI>: N. F. 165 Sympathiquement, le mystère de l’heure accen-tuera la poésie du lieu ; car c’est l’heure qui change, encore plus que le sujet, sur la toile : on avait déjà vu, dans nos Salons du plein-air, des coiffes de Bretonnes ou des casquettes de pêcheurs, des ma-rines vraisemblables et de vrais costumes, et des pardons, et des assemblées; mais ce qui manque aux documents des Duel., ries Renouf ou des Ulysse Butin, n’est-ce pas ce manteau de crépuscule épandu, comme une pensée, sur leur laideur ? A l’église, au travail, au cabaret mème, les rudes silhouettes