L’ART ET LES ARTISTES la main gauche — des mains fluettes, fines, de blanc ganiées, — elle écarte, hésitante, en un geste inachevé de Cérès Eleusine, la transparente soie qui voilait son visage, encadré de cheveux magnifiques. Et elle découvre ainsi sous le large et très simple chapeau, un front lourd de pensée, un nez résolu, vaillant, qui se retient de pal-piter, des lèvres scellées comme sur d’irrémis-sibles paroles, et des yeux, enfin, des yeux qui interrogent et se défendent de répondre ; des yeux déçus qui souffrent de ne pas flamber de foi; des yeux sincères que pourtant la traîtrise de la vie oblige à se garder de périlleux aveux; des yeux profonds et recélant, à l’abri de leur miroir figé, des trésors de bonté, sans doute, et de délicatesse, ainsi qu’un immobile étang, sous les reflets d’un ciel brouillé d’automne, dissimule au regard du promeneur qui passe les délicats spectacles de ses profondeurs, la fragile dentelle des algues, le capricieux enchevêtrement des herbes taquinées par la source prochaine, le glissement cauteleux de craintives bestioles. La main droite balance un masque, image, trait pour trait, du visage, encadré, pareillement à lui, mais accueillant, mais souriant de ses grands yeux exquis, le masque qu’on revêt, pour courir le monde; le masque qui ment; le seul que con-naissent les indifférents qui nous entourent. Telle est la Femme an Masque, l’une des dernières oeuvres de M. Antoon van Welie, l’une de celles qu’il préfère entre toutes, la plus significative, sans doute. GUSTAVE BABIN. Phot. Vommona. LES QUATRE VIEUX QUI ATTENDENT LE BATEAU (Ace A RULE) 21$