L’ART ET LES ARTISTES Un autre élève de Lambert Lombard, Frans Floris (15 f 8-f 57o) que ses contemporains surnom-mèrent l’Incomparable, porta le dernier coup à l’école flamande primitive. Revenu enthousiasmé de Rome, où il avait vu Michel-Ange décou-vrir au public son Jan mien( dernier, de la Sixtine, il abdiqua ses qualités natives pour plagier le grand florentin devenu son Dieu. Et ses tableaux, vins pastiches il I ast.caes m.cde.angesques, lui valurent la faveur publique et la protection de la cour. Son chef-d’oeuvre d’Anvers, la Choie des Anges rebelles, présen-te seul une cer-taine origina-lité, ainsi que de lointaines réminiscences avec lescauche-mars diaboli-ques si fla-mands de Jé-rôme Bosch. L’influence de Floris fut fatale à l’art de son pays. Son enseignement fit naître une nouvelle pléïa-de d’artistes romanisants, qui achevèrent de corrompre, à Anvers com-me à Bruxelles, le goût du pu-blic. On porte jusqu’à cent-vingt et même davantage, le nombre des élèves qui fré-quentèrent son atelier. Vingt-neuf sont cités par van Mander, et parmi ceux-ci : Martin de Vos, le plus célèbre de tous; Lucas de Heere, déjà cité, Crispin vais den Broeck et les deux frères Ambroise et Jérôme Francken, membres d’une prolifique famille de peintres, dont malheureusement aucun n’arriva à la célébrité. C’est dans le portrait principalement que le génie flamand protesta contre l’invasion de l’ita-lianisme. e Placés, comme le dit M. P. Mante, sur le solide terrain de la réalité, ennemis de tout men-songe, systématiquement hostiles aux séductions de l’idéal, les portraitistes jouèrent en Flandre, pen-dant tout le siècle, un rôle semblable à celui que Hans Holbein remplit en Suisse et en Angle-terre. Ils n’eurent pas moins que lui le respect des physionomies individuelles, le culte de la ressem-blance intime, la forte notion de la vie intérieure. à A côté de tableaux romanisants souvent mé-diocres, Pierre Pourbus le Vieux (1 510-1585), le dernier des grands peintres de Bruges (dont on connaît le portrait de Clé-ment Marot); les van Clève, dontlemeilleur fut Josse, dit le Fon (1 4 9 I-I 540); Guil-laume Key (1520-1568), qui eut l’in-quiétant hon-neur de pein-dre le duc d’Albe; Adrien Thomas Ke y, à qui l’on doit les superbes donateurs du m usée d’A n – vers, laissèrent tous des por-traits, véri-tables chefs-d’œuvre d’ar-rangement physionomis-te, où ils su-rent continuer dignement l’écale créée par les van Eyck. A cette épo-que, où presque tous les peintres flamands se faisaient romains ou florentins, e un artiste, à qui l’Histoire, mieux informée, accordera tôt ou tard une importance considérable, Pierre Breughel le Vieux — ou le Drôle – se chargeait de faire par-ler la vérité flamande, presqu’aussi haut que le mensonge de la mythologie italienne ; mieux que Jérôme Bosch, il synthétisa l’esprit populaire et goguenard de la Flandre. Selon la mode du temps, il fit le voyage d’Italie et laissa dans son œuvre de nombreux souvenirs App. Ir con, d’Harrar’, LE MAURE DES FEMMES A MI-CORPS TROIS JEUNES FILLES FAISANT DE LA MUSIQUE 206