L’ART DÉCORATIF pour accuser dans toutes ses rigueurs la réalité de nos âmes, n’ont pas manqué d’ap-puyer sur ces révélations contrastées de Venise, qu’à aucune époque encore on n’a été induit à sentir aussi intensément qu’au-jourd’hui. Dans Le Feu, Gabriele d’An-nunzio a pleinement exprimé cette exaltation et cette fièvre dont Venise envahit tout notre être, et dont j’ai dit un mot à propos de la des spectacles vénitiens quelques aperçus subtilement nuancés. Il est impossible que cette orientation de la littérature n’ait pas sur la philosophie des peintres, et par suite sur le caractère de leurs tableaux, une influence certaine. Le contraste de ces lieux, — absorbés CH. COTTET révélation de Tristan. La ville s’y peint sous ses aspects de féte ardente et dans ses mornes vestiges de vie éteinte. Le feu ré-chauffe, incendie, projette d’étranges fusées de lumière ; puis la flamme vacille et dis-parait, il ne reste plus qu’une cendre. L’i-mage se développe et se poursuit dans toutes ses variations à travers l’oeuvre du poète, qui demeurera un définitif commentaire de l’énigme de Venise. En France, d’autres pages récentes de M. Maurice Barrès sur La Mort de Venise ont aussi apporté dans cette pénétration secrète 54 Enfants de Chioggia dans leur vétusté, dépouillés de tout ce qui fait le bruit ordinaire du monde, — et des manifestations de la vie est d’autant plus frappant qu’il y a à Venise une véritable animation, profondément caractéristique. Nous avons déjà parlé du monde des pécheurs; il faut voir aussi, comme dans toutes les villes italiennes, ces coins de marchés grouillants et pittoresques qui ont ici une saveur encore plus forte, le marché aux poissons par l’abondant butin déchargé tout vif de l’Adriatique, et le marché aux légumes par cet apport des barques pleines,