LA SCULPTURE AUX SALONS Je tiens toutefois à citer ici, à côté de telles oeuvres, les petits médaillons dus à Mélo Antoi-nette Vallgren, d’un modelé sensible, dignes de la femme sincère et raffinée qui soutient l’artiste dans son travail, lui donne le spectacle d’une ac-tivité soeur et qui crée, avec quelques plaquettes de bronze, avec de curieuses gravures sur bois, de rares, de délicates, de somptueuses reliures. Au Salon de la Société Nationale l’idée de la mort a inspiré d’autres sculpteurs que MM. Bartholomé et Vall-gren. Le tombeau de Mme Clément-Carpeaux est fort impressionnant. Une femme en peignoir repose, la téte à l’oreiller, tandis qu’une se-conde, vétements épars, à genoux, s’appuie contre la couche funèbre, étend une main vers le corps avec une expression d’indicible stu-peur. Sur le visage de la morte on lit tous les signes qui an-noncent la fuite de la pensée, qui présagent l’imminente destruction, le pincement de la bouche et des narines, la détente des justes, l’horrible dépression des tempes. Il y a là un réalisme un peu pé-nible, aggravé, je crois, par l’élégance moderne du cos-tume, les dentelles ornant les manches, le col, le devant du peignoir. L’oeuvre est certainement émouvante , mais on y souhaiterait moins de précision, une piété plus discrète • et plus immatérielle. A l’âpre souci de vérité qui guidait les artistes du moyen âge et de notre renaissance, je préfère, quant à moi, lorsqu’il s’agit de la Mort, la réserve quasi religieuse des anciens. Comme les auteurs tragiques qui évitaient de répandre le sang sur la scène, qui épargnaient au spectateur toute image inharmonieuse et violente ; comme les poètes qui se gardaient de toute laide description, les sculpteurs hellènes s’in-géniaient à trouver des euphémismes pour désigner celle qu’on ne devait pas explicite-ment nommer. Je ne crois pas qu’il existe en A. BARTHOLOAIÉ 229 grec un mot correspondant au mot » la camarde ”, et je suis sûr que Praxitèle n’eût pas goûté le groupe où M. Mulot nous mon-tre une femme étendue, aux bras d’un spec-tre dont on aperçoit sous le suaire l’odieux sourire décharné. «Divine Mort » , ainsi s’intitule l’oeuvre de M. Mulot. Il ne flotte