L’ART DF.CORATIF ceux-là; mais insensiblement, ou plutôt très sensiblement, les arts mineurs cédèrent la place aux arts majeurs, si l’on ose ainsi dire. Et à l’issue de la brillante période dé-cennale, les arts du décor sont presque dé-paysés parmi l’imposant ensemble des tra-vaux d’art pur. C’est là une faute, ou tout au moins un grand tort. Car c’est juste au ; Y 773 u- LC-11-1 dib DEVRELSE Plaquette moment où les arts décoratifs prennent un essor définitif vers une réalisation absolu-ment nouvelle et s’expriment par des œuvres de plus en plus originales dans tous les do-maines, que La Libre Esthétique, dont ce serait le rôle pourtant, néglige de nous les faire voir, de nous les faire admirer. Cette mission qu’elle n’a pas voulu accomplir va être tentée prochainement à Bruxelles. Ce sera, dans notre vie intellectuelle, une la-cune qui sera comblée à la grande joie de ceux qui aiment suivre les mouvements artistiques de tous les pays. Quand on parcourt le Salon de La Libre Esthétique, on n’a pas l’impression qui de-vrait se dégager des expositions de cercles. Dans ceux-ci, on sent parfois l’action com-mune, le labeur collectif et varié d’un groupe dont les membres travaillent dans l’espoir de démontrer chaque saison le ré-sultat de leur peine, le développement de leurs visions et l’excellence de leurs re-cherches respectives. Il n’en est pas ainsi à La Libre Esthétique. On s’y rend tout de suite compte que les exposants y sont re-présentés en général par des envois qu’eux-mêmes estiment comme secondaires. M. Maurice Denis, dont on n’a pas ou-blié l’énigmatique Hommage à Céîanne, piétine sur place. Il possède une gaucherie roublarde : manque de proportions, chairs malades, à reflets cholériques. Quel profond talent dépensé dans ces efforts peu louables! Ainsi, dans la Sainte Famille, la tète de la madone, d’une coupe ovale, où brillent tem drement des yeux bleus et où rit une bouche affectueusement plissée, est vraiment divine. On sent que l’artiste a laissé parler son anse et qu’il n’a pas voulu titre… en faussant sa vision naturelle. M. Henri I.ebasque, qui reste dans la saine tradition française, obtient, au moyen d’une facture touillée et volontaire, des sous-bois mer-veilleusement ensoleillés, d’une fraîcheur bienfaisante, pleine d’air et d’espace. Les chairs nues des corps qui s’ébattent dans l’eau ou qui se profilent sur les frondaisons sont délicatement enveloppées et s’accordent tout à fait avec les ambiances sylvestres. M. Louis Paviot, un autre luministe, est plus lourd. Ses feuillages trop opaques lais-sent à peine filtrer la clarté de l’astre, et tout en devient pesant et métallique. Les dessins largement tracés et nerveux de MM. Pablo Roïg et Maxime Dethomas semblent donner l’illusion, ceux-ci d’un Steinlen influencé par Huard (voir à ce sujet le caractéristique Homme de LoL, ceux-là d’un Steidlen teinté de Toulouse-Lautrec. Les. Belges, en grand nombre, comme à l’ordinaire, forment une section du plus vit intérêt. Les eaux-fortes fougueuses et ex-pressives de M. Albert Baertsoen voisinent avec. une énorme toile du maître gantois: Les Tjalken, En Zélande, Le soir. Mise en scène adroite : un large canal; au fond, deux bateaux amarrés à la rive, qui se 198