L’ART DÉCORATIF cette spontanéité et cette justesse, les noms de Manet et de Velasquez, ce qui montre bien encore que, par delà les siècles, les maitres, si divers qu’ils soient, se rejoignent par une communauté de tendances, de doctrine. C’est ce même goût de la vie franche-contour d’épaule, la cambrure d’un dos, les ombres qui se jouent sur une gorge, ont pour M. Besnard une séduction sans cesse renouvelée. Il est peintre aussi pleine. ment que possible, par la joie de donner corps à de solides modelés, souples dans leur fermeté, à de belles vi-ALBERT BESNARD ment observée, sentie dans toutes ses gran-deurs et ses misères, que nous avons vu renaître de plus en plus parmi divers groupes de peintres contemporains, à la suite de quelques aînés, dont M. Besnard peut être considéré comme le plus puissant, le plus inlassable dans son effort de vérité. On sent toujours dans son œuvre la volupté des belles formes. Un mouvement de cou, un Portrait de Madame Besnard sions colorées, qui chantent la force , la santé et la vie. Cette har-diesse dans le jet d’un mou-veinent, cette franchise dans le rendu de la couleur vraie, ont souvent fait scandale auprès d’une partie du pu-blic, qui ne vit que de con-ventions et n’a plus même les yeux assez neufs pour voir les cho-ses de la na-ture et de la vie sous leurs vrais aspects. Il leur faut des chloroses dis-tinguées. une a tfé terie de bon tom Il v a des tonalités mo-yennes dans lesquelles on doit se tenir. Line prairiequi a l’inconve-nance d’être verte, un ciel qui aurait l’inex-plicable singularité d’être jaune ou violet, tout comme une figure aux joues rouges, ou mar-brée de reflets et d’ombres, passeront dans une œuvre picturale pour des fantaisies condam-nables et vulgaires. Il y a des heures et des aspects délicats et consacrés: les divagations de la nature doivent être émondées par notre goût pour entrer dans le domaine de 1 166