L’ART DECORATIF loureusc. La tendresse de M■■■0 Girardet ne se limite pas toutefois au cercle de la famille, elle se répand au dehors, sur les faibles et les pauvres, sur tous les déshérités du sort. La tete de vieille de l’Exposition universelle de i ocm, une statuette de paysanne bran-lante et recroquevillée, l’aïeule de la Béné-diction prouvent une âme largement atten-tive, pitoyable, aimante. Beaucoup de femmes longue et ravagée, épaules tombantes, croise les mains devant la miche qu’il va rompre. L’incertitude du repas de demain attriste ses regards et sa bouche, mais il remercie Dieu avec une ferveur bien humble pour la maigre nourriture du jour. La femme, moins ré-signée, verse des larmes amères et s’affaisse sous le fardeau de son intolérable vie. La fillette lève ses yeux confiants vers son grancUpère, si las, si faible, si sujet, et qui cependant, pour elle, personnifie la Providence. Désespoir, acceptation mélancolique, confiance ingénue, quelle émouvante trinité_’ Je n’ai vu le groupe qu’à l’état d’é-bauche:Mais j’en ai gardé une impression profonde. Je l’évoque, dans le clair atelier du boulevard Inker-mann, à Neuilly, dressant ses pathétiques ligures, et j’entends le sculpteur, daine jeune , élégante , parée, m’entretenir simplement de son rêve humanitaire; me rapporter ce propos du pauvre homme qui lui servit de modèle pour le Pain quotidien: J’ai le contentement puisque le Maitre veut que je sois misérable ! L’atelier de Neuilly, coquet et discret, caché aux yeux des passants par un voile de verdure, por-tant à son fronton une saine image de maternité, a vu naître d’autres oeuvres encore : le Départ du pécheur, inspiré d’un roman célèbre de Loti, sentimental sans aucune fadeur, une Vierge avec l’enfant tout à fait exquise, auréolée de divin, le Sabot de Noël et des bustes nombreux, parmi les-quels le portrait de M. Girardet, véridique et familier, reproduisant les traits d’un peintre aimable et d’un époux enthousiaste. Tout cela fut mûri là, dans la tiède retraite, ouverte si tendrement aux grâces et aux tristesses de la vie ambiante. Un Toréador, nerveux et fier, rapporté de Séville, atteste cependant que le sculpteur s’inquiète Le départ du pécheur ont aujourd’hui cette admirable ouverture de coeur. Et nous dont l’égoïste amour n’embrasse que deux ou trois êtres choisis, nous nous étonnons d’une telle faculté de chérir. Philanthropes par esprit de justice, nous ne savons donner aux hommes ni notre émotion ni nos pleurs. Lequel d’entre nous aurait conçu cette scène, le Pain quo-tidien, que Mme Girardet exposera au pro-chain Salon ? Un talent masculin eût-il exprimé de façon aussi touchante les sen-timents des trois êtres réunis autour de la chose nécessaire et sacrée? Le vieillard, face 1 1 8 FIND ART DOC