MADAME BERTHE GIRARDET leurs étonnements, leurs curiosités, leurs enquêtes touchantes sur les choses, leur dé-couverte ravie du monde, leur chancelante audace, la drôlerie de leurs gestes, la lim-pidité de leurs sourires. Nous nous la figu-rons jeune mère, comme Albert Besnard nous montre sa compagne: Un de nos enfants lui sert de modèle, elle étudie les jolis modelés du poupon durant qu’elle l’al-laite, caressant d’un doigt léger les saillies 1902, marqua ses plus cruelles angoisses. Son fils était art lit, menacé d’une méningite. Quand il venait à s’assoupir, au milieu de la journée, la mère gagnait l’atelier de l’ar-tiste et, ivre de chagrin, de larmes, contrai-gnait la glaise à crier sa douleur, à repré-senter la scène qu’elle avait tout à l’heure devant les yeux, dont elle gardait l’halluci-nante vision. Travailler d’après le frêle patient lui-même lui eût semblé un sacrilège. Tes de son front, de son menton délicat, faisant jouer la lumière qui, en se déplaçant, varie les taches d’ombre. Puis Mnm Girardet a suivi avec orgueil la double croissance de ses bambins. Elle les a surpris dans un instant de câlinerie charmante, mêlant leurs boucles, le garçon embrassant la fillette, qui lève une main mutine. Ce guMpe, d’un sentiment si frais et d’une allure si souple, paru au Salon de 1901, résuma les joies, les fiertés maternelles du sculpteur. L’Enfant malade, du Salon de 1 17 L’enfant malade (Petit Palais des ChampsSlysées) hommes, le Tintoret, le peintre de L’ Œuvre, peuvent avoir de ces tristes courages. Mais dans le jeune modèle italien qui lui donnait la pose, lP’e Girardet apercevait nettement la chair de sa chair, torturée, brûlante, mouillée des sueurs d’agonie. Elle vécut là des instants vraiment tragiques. Son oeuvre en reçut par contre une émouvante beauté. Les visiteurs du Petit Palais où L’Enfant malade se trouve maintenant, au nombre des sculptures acquises par la Ville, sentiront battre dans ce groupe le coeur d’une mère dou-