L’ART DÉCORATIF puissantes lui offraient leur appui, elle exé-cuta un nombre considérable de portraits, hélas ! bien inférieurs au petit buste du début de sa carrière. Ah! celui-là seul qui, mites de son âme, mais inexperte, naïve, inachevée, eut l’héroïque courage de faire face pendant cette éternité de quatre années à ces lourdes besognes qui la détournaient de la véritable étude. Par dévouement aux siens elle résista à toute tentation égoïste. Elle se montra femme avant tout, et c’est le plus bel éloge dont on puisse lui faire l’hommage. Un homme doué comme elle, étant aussi pénétré de la vision de l’art dans la beauté, n’eût pas eu ce renoncement apparent à l’idéal. Sans doute, domptant la nécessité, il eût étudié d’abord, puis il fût devenu grand, grand de sa solitude et de tout son dédain pour la souf-rance ; mais ayant moins souffert, eût-il aussi bien compris? La femme, elle, sait souffrir et son idéal, qu’elle enferme au plus profond de son coeur, y grandit pendant que le nôtre surgit et domine, et souvent aussi, il faut l’avouer, s’épar-pille. Voilà le secret de notre force et celui d’une faiblesse dont le mystère nous attire. Nul ne connaitra jamais à l’abri de quel sanctuaire très saint certaines nobles femmes abritent le trésor de leur âme, tandis que nous, triomphateurs éternels, qui d’abord ex-tériorisons nos moindres facultés, on nous connaît toujours. C’est pourquoi moi, le compagnon de celle dont je parle ici, j’ai voulu être le premier à la faire connaitre. La modestie dans ce cas impliquerait assimilation totale d’un de nous deux à l’autre. En parlant d’elle je ne parle pas de moi; nous sommes bien deux dans notre ménage d’artistes, mais deux vers une mème aspiration; dualité qui fut l’action bienfaisante de notre commune vie. Ces quatre années à Londres furent en apparence brillantes. Un buste de la princesse Louise de Galles, traité en marbre et en ivoire, un autre de la fille de la duchesse de S. amorcèrent nombre de commandes de portraits d’enfants dans l’aristocratie anglaise qui, tous, figurèrent en bonne place à di-verses expositions de la Royale Académie. D’autres oeuvres suivirent, plus importantes : entre autres le buste de l’explorateur Stanley. La voilà donc, cette jeune femme, portrai-S’ François d’Assise déjà maitre dans son art, s’abandonne à ce perpétuel contact avec les passants aux rêves bourgeois, sait combien il y laisse de lui-meme. Et cela dura quatre longues années. Cette vaillante enfant, artiste jusqu’aux li-46 FIND ART DOC