L’ART DÉCORATIF M. Bartholomé. L’organisme humain, s’il L veto, signifie toute l’âme. Les combinaisons de mouvements cherchées par le sculpteur sont plus psychologiques encore que plas-tiques. Le corps lui sert tour à tour à exprimer la fatigue, la résignation, l’amour, l’espoir, le regret, sans horreur et sans hé-roïsme. Et il sort de ces nudités une telle puissance suggestive que nous ne les voyons presque plus matérielles. La chasteté de telle jeune fille nue, désirable encore, us: inimi-sache et crispée de Rodin n’ont guère tait que grimacer. Pareillement la tranquille gravité de M. Bartholomé ne s’imitera pas. Il y a là une sorte d’élégance triste qui est à mille lieues de l’élégance académique. Jamais l’amenuisement des formes, la mai-greur, la subtilité des modelés, n’empêchent de deviner les organes intérieurs, la vitalité, le jeu naturel du sang et des nerfs : ce sont là des âtres nus tels qu’on les voit, et non des momies vidées de leurs viscères et units-Femme sortant du bain table : cette chair est défendue contre le désir présent par l’ombre future à laquelle elle est vouée. Elle est vivante et déjà intan-gible. Et sur presque toutes les figures de M. Bartholomé il y a ces ombres psycho-logiques, ces presciences, ces reflets de sa contemplation douloureuse et calmée, envi-sageant le destin avec une grâce étrange, poignante comme un baiser dans l’obscurité. Rien, dans les nus de M. Bartholomé, ne rappellera I École, et pourtant rien n’est plus raisonnable et plus ennemi, de la re-cherche pittoresque, du saillant imprévu, de la cambrure originale. Ceux qui ont cherché ces choses auprès de l’oeuvre ardente, sen-3i livées, rendues propres de cette affreuse pro-preté d’embaumeurs qui est, pour les gens de l’École, «l’ennoblissement » de la créature. La grâce des nudités de M. Bartholomé ré-sulte, comme celle des graciles baigneuses de Degas, de la franche vérité de leur étude, du charme réel de leurs épaules milices, de leurs torses on transparais la fine ossature, de leurs tetes pensives et douces qui ne visent pas à la « beauté 0 canonique. Voilà vraiment nos frères, voilà ce que nous sommes, voilà l’enveloppe dans laquelle, depuis cinquante siècles, nos pensées ont germé. Et ces étres restitués dans la scrupu-leuse plénitude du vrai sont complets. du