OCTOBRE 1902 Ange d’autel plantes des bois, des jardins et des champs sont dès maintenant propres à décorer un objet, à constituer cet objet même. Camille Lefèvre possède dans ses cartons une quan-tité de ces projets nés de l’interprétation directe de la nature. Le céramiste Muller en a exécuté quelques-uns. Mais le sculpteur continue à noter sur le papier la vie du monde végétal, la façon dom les feuilles s’attachent aux tiges, dont les boutons s’é-panouissent en corolle, dont les organismes s’engendrent et se transforment à l’infini. Il se prépare ainsi un répertoire d’éléments décoratifs qui lui permettront d’encadrer et de soutenir ses originales figures, qui déjà lui permettent de créer pour un portail roman, à reconstruire au pays du soleil, une floraison neuve, affranchie de l’imitation ser-vile du passé. Je n’ai pas tout dit sur Camille Lefèvre. Je n’ai pas dit la sensualité molle et trou-blante de son buste : ,’ Dans un rêve ”, le naturel du « Gué ”, la frissonnante tendresse du bas-relief s Avril ”, la franche allure de la frise « les Sirènes t, les faisceaux d’hé-lianthes qui encadrent et soutiennent, rue de Provence, le portail de s l’Art Nouveau ”. Je n’ai pas dit ses pages dessinées pour d’Assiette au beurree, oit passe un large souffle d’indignation et de pitié ; ses por-traits au crayon noir d’une volonté linéaire si intense qu’elle étonne chez un pétris-seur de glaise ; je n’ai pas dit non plus sa collaboration à l’oeuvre posthume de Dalou. On sait, en effet, qu’il s’occupe d’achever le monument de Gambetta. Dalou l’avait lui-même désigné pour cette tâche. Une amitié solide unissait les deux sculpteurs. Elle avait pris naissance dans un commun amour des humbles, dans un commun désir d’amé-lioration sociale. Leurs conceptions d’art cependant étaient dif-férentes. Vi-gueur magni• figue et pro-fond savoir. Dalou ne pos-sédait pas au même degré que Camille Lefèvre le sens du mo-derne. Sans doute, on ad-mire de lui des bustes d’une facturé expressive, d’un âpre ca-ractère , Oit l’énergie des instincts et de l’âme parle avec une sin-gulière élo-quence. Dans l’atelier de l’impasse dl: Maine, qu’:1 Cessé d’ani-mer l’aslitiu: IlerVell, du statuaire, j’ai vu une série 2 87 /