OCTOBRE 1902 la retrouvons sur la plaquette, modelée pour la Chambre syndicale de la bijouterie, et nous la rencontrons, avec d’autres propor-tions, à Ivry, dominant le fronton de l’Hôtel-de-Ville. Elle a quitté la blouse ; dans sa robe simple, aux manches bouffantes, elle offre une silhouette pleine de neuve saveur. Elle tient l’écusson de la cité, elle se penche, pro-tectrice, vers la façade oit des hommes du peuple accomplissent leur travail. Car, à l’instigation de Camille Lefèvre , les niches qui devaient rece-voir les sempiternels hôtes mythologiques, les Flore, les Vertumne et les Po-mone, furent occupées par de modernes artisans. L’auteur de s La Tradi-tion républicaine exé-cuta deux de ces figures: ,■ le Batelier s, ,le Sculp-teur,. Il fit du sculpteur une oeuvre forte et sobre, du plus éloquent réa-lisme. Il rendit admira-blement l’attitude fléchie du vieux praticien, la gène de son geste, son application à la tâche qui ride le grand front chauve et fait se crisper la main sur le ciseau. Il donna, dans cet ensemble de la ville tutélaire et des deux ouvriers besognant sous sa garde, un rare exemple d’art vraiment social. Le socialisme ne date pas de nos jours. Il a rencontré dans la vie du Christ sa réali-sation la plus haute. L’histoire d’un dieu qui nait dans une étable, grandit parmi les humbles travaux, passe son existence ter-restre en compagnie de petites gens, qui tend les mains à la prostituée et veut rendre l’âme entre deux larrons, tout ce déroulement de bonté familière, de douce charité, de sublime mansuétude était bien fait pour toucher un esprit noblement altruiste. Camille Lefèvre se laissa séduire par tant de ten-dresse. Après un modèle de décoration laïque, il créa un modèle de décoration chrétienne. Nous nous souvenons de l’autel présenté à la dernière Exposition universelle par la maison Poussielgue-Rusand. C’était une œuvre harmonieuse et raisonnable, qui ne ressemblait en rien arts odieuses fabrications Buste de jeune fille des industriels du quartier Saint-Sulpice, qui ne pastichait point cependant les inventions exquises des XIIP et XIV° siècles. L’archi-tecte, M. Charles Guénys, avait inscrit dans tune sorte d’ogive un ensemble en grès cé-rame, original et parfait. Entre les deux branches, émaillées de vert, il avait distribué le tabernacle, la niche réservée à la Vierge, les cases symétriques où devaient s’enchâsser des bas-reliefs dorés. Son architecture si 285 FIND ART DOC