AVRIL 1902 ses calmes marines, aux instants de l’aurore et du soir. Il s’est recueilli longtemps au-près des «Ports de mer » qu’on montre au Louvre, d’une conception si aisément ma-jestueuse, où la vague ondule avec tant de mollesse, où k soleil déploie de si délicats prestiges. Ces toiles lui ont enseigné la limpidité des ambiances, l’ondoiement subtil de l’azur, le miracle de la lumière qui transforme toutes choses. M.. René Ménard a chéri chez Nicolas Poussin l’harmo-nieuse ordonnance des plaines et des col-lines, des bosquets, des architectures, des rochers, des rives sinueuses, des lacs pai-sibles, la conception d’un univers idéal, obéissant aux seules lois de l’équilibre et de l’eurythmie. Son goût du pittoresque gran-diose, intensément médité, il en a pris con-science devant ce créateur sévère, comme il a senti s’éveiller devant Ruvsdald sa ten-dresse contenue, son pur et discret pathé-3 SOIR D’ORAGE tisme. Les vastes plans ombreux, les arbres courbés par la rafale, les nuages filant sur les ciels bas, étageant leurs masses pesantes, l’austère majesté des éléments, ces thèmes familiers de Ruysdaël, on les trouve dans l’oeuvre de René Ménard. Rappelez-vous le Soir d’orage et l’Orage sur la forèt. Un chène s’érige près d’une mare, flomine la lande où croissent quelques rares bruyères. Il est douloureusement mutilé, mort dans ses plus grosses branches, mais un rameau survivant le panache d’une chevelure vigou-reuse. Depuis des heures déjà il lutte contre la tempête. Une lueur verte, orange, pour-prée vient d’écarter la nue, éclaire le rude combat, anime d’un reflet l’eau solitaire. Puis, c’est tout un bois flagellé, les feuil-lages aux profondes rousseurs déferlant vers les lointains, un tronc pèle, violàtre, faisant des gestes sinistres, et, couchées parmi l’herbe d’automne, trois vaches pleines de tranquil-